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Carnets du dessert de lune

 

Fondées en 1995, dans la mouvance des éditions L’horizon Vertical qu’animait Antonello Palumbo, Les Carnets du Dessert de Lune publient des livres de différents formats, où se retrouvent aphorismes, carnet de dessins, chroniques, contes, journal, micro fictions, nouvelles, poésie, prose, roman, recettes de cuisine, récit.

Plus de 160 titres publiés depuis ce jour de février 95 où naquirent et s’associèrent ces trois mots, Dessert, Lune, Carnet à propos desquels 10 ans plus tard, 46 auteurs tentèrent d’en percer le secret dans un ouvrage collectif « Carnet d’un Dessert de Lune à 46 pieds au-dessus du niveau de la mer du Nord. »

 

Pieds nus dans R, Perrine Le Querrec

Ecrit par Cathy Garcia , le Mardi, 14 Avril 2015. , dans Carnets du dessert de lune, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Pieds nus dans R, février 2015, 28 pages, 5 € . Ecrivain(s): Perrine Le Querrec Edition: Carnets du dessert de lune

 

Petit joyau ce pousse-café là, tête-bêche en plus : Pieds nus dans R. ou Barefoot in R. dans sa version anglaise, traduit en anglais par Derek Munn. Petit joyau car la plume de Perrine Le Querrec, quand elle ne la laboure pas, vole au-dessus de la page, et il pleut des mots, il pleut de la langue de poète, de celle qui enivre, que l’on boirait encore et encore, jusqu’à tomber par terre ivre vivant ! Ce livre dédié à N. parle d’un « il » qui revient de R. pieds nus : j’ai perdu mes chaussures à R., me dit-il en arrivant (…) R. qui se targue d’être la Ville, une ville tout en cadres en bordures en netteté.

Comment cela a-t-il pu arriver ? Comment perdre ses chaussures, sa raison, son assise et son apparence, comment se délacer – ô savoureux double sens –, s’égarer, se soustraire aux codes de R., nation d’ordre, de discipline où le premier pas de l’enfant est calculé à la courbe du rendement de R. ? Oui, comment ? Dans un rythme entraînant, envoûtant qui galope sur la page comme une épidémie de pieds nus justement, on se laisse gagner par l’exaltation liberterre de ce nudisme, deux pieds, nus de chair de veines et d’os, de pieds sans semblants, sans artifices ni parures.

La Patagonie, Perrine Le Querrec

Ecrit par Cathy Garcia , le Mardi, 25 Novembre 2014. , dans Carnets du dessert de lune, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

La Patagonie, préface de Jean-Marc Flahaut, novembre 2014, 103 pages, 13 € . Ecrivain(s): Perrine Le Querrec Edition: Carnets du dessert de lune

 

Lire Perrine Le Querrec c’est prendre un risque, prendre le risque de se faire engloutir. Les mots ici deviennent matière, tantôt gluante, paralysante, tantôt rêche, étrangleuse, tantôt lourde, étouffante, tantôt acérée, tranchante, de la matière sombre, grouillante et tremblante, puis soudain ils ont des ailes et tentent de s’échapper vers la lumière. Vers la Patagonie.

Ou bien ils s’écrasent. La pâte-agonie.

Il y est question d’enfance, de violence, de peur et de désespoir ravalés, d’extrême solitude. « Son enfance sent toujours le carnage ». Quelque chose qui ne se voit pas de l’extérieur, quelque chose que l’on peut trimballer en soi toute une vie, qui nous dévore de l’intérieur et personne ne s’en aperçoit. Personne ne s’en est jamais aperçu. Alors les mots tentent de donner consistance à cette grande béance, de faire apparaître l’indicible, l’invisible, tentative qui elle-même écartèle : faire à la fois apparaître et disparaître à jamais. Fuir. « Il ne faut pas fermer la porte mais la claquer derrière soi et partir pour toujours ».

Grains de fables de mon sablier, Jean-François Mathé

Ecrit par Cathy Garcia , le Samedi, 22 Novembre 2014. , dans Carnets du dessert de lune, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Jeunesse

Grains de fables de mon sablier, illustrations de Charlotte Berghman, novembre 2014, 78 pages, 10 € . Ecrivain(s): Jean-François Mathé et Charlotte Berghman Edition: Carnets du dessert de lune

 

Petit format à glisser dans la poche, beau papier, belles illustrations colorées et de la poésie tout plein, pour les enfants jusqu’à 103 ans.

En poésie, on voyagera, Nos rêves sont les seuls voiliers/Que le tour du monde désire, on voguera sur le Nil, même si c’est sur un lit, /Moitié face, moitié profil, /Bloqué par un torticolis. On appréciera le petit déjeuner servi par l’hôtesse de l’air Un croissant de lune/Dans un bol de thé. /Et si l’on est sage, /Avec notre thé/ On aura du lait, / mais juste un nuage.

On ne manquera pas de comprendre l’étonnement du chien à qui on ne donne jamais sa langue et qui ne voudra pas avoir pour copain le rouge-gorge qui n’aide à rien, il fait le beau/ Et quand je l’ignore, il babille.

Ces grains de fables s’écoulent au fil des pages, tantôt moelleux, tantôt croquants, souvent drôles et portés par des courants d’air de joyeuse impertinence, car le vent ne renonce pas à enseigner la liberté/À tout ce que l’on tient en cage, mais également mêlés de quelques pointes de cruauté, quand par exemple sous la dent, le grain cachait un petit ami : trop tard on l’a avalé !

Démolition, Jean-Christophe Belleveaux

Ecrit par Cathy Garcia , le Vendredi, 21 Mars 2014. , dans Carnets du dessert de lune, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Démolition, illustrations d’Yves Budin, 2013, 78 pages, 11 € . Ecrivain(s): Jean-Christophe Belleveaux Edition: Carnets du dessert de lune

 

Démolition de Jean-Christophe Belleveaux se lit une fois puis se relit, en espérant cette fois en ressortir moins essoufflé. Démolition aurait pu aussi bien s’intituler débordements et suffocation, car il s’agit principalement ici d’évacuer un trop-plein, comme annoncé dans la première phrase du recueil, en italique, comme l’auteur se citant lui-même :

Le monde est trop plein, ma poitrine en déborde

Pas de majuscule, on y entre de plain-pied ou comme un de ces pavés dans la mare et les retours à la ligne n’ont rien de convenu, mais donnent le ton saccadé qui nous place d’emblée dans la tête de l’auteur, comme à bord d’un véhicule à embarquement immédiat. Nous voilà secoués, soubresautés, subissant des embardées avec toutefois quelques moments où le trajet semble s’apaiser mais pas pour longtemps. Le chemin n’a rien d’une autoroute, mais bien plutôt un de ces chemins de terre, pleins de trous et de bosses, qui mènent on ne sait où, l’idée même d’une destination étant hors de propos.

Jour, Jean-Jacques Marimbert

Ecrit par Martine L. Petauton , le Lundi, 10 Février 2014. , dans Carnets du dessert de lune, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Jour, juin 2013, 59 pages, 10 € . Ecrivain(s): Jean-Jacques Marimbert Edition: Carnets du dessert de lune

 

En poésie, il y a tant de manières d’aborder, de lire, d’aimer… et tant d’émotionnel dans cet exercice-là ! Ceux, par exemple, qui vous diront tout de l’architecture, des chemins qu’empruntent ces mots à part du reste des écritures, qui analysent, conceptualisent et vous « disent » – sans contestation aucune – le sens, le vrai, le définitif. Ceux qui sauront, presque immédiatement, les ponts si évidents, disent-ils, avec cet autre immense poète, et qui intimident au point de nous laisser à la porte de leur précieuse chapelle. Et puis, il y a ceux qui veulent voyager en poésie, à leur rythme, comme ça leur chante ; ceux qui vont au pays des vers, comme au concert, pour la musique, le voyage, le coup au cœur. Ceux qui la lisent, cette poésie, à mi-voix, et l’emportent partout en promenade, pour en savourer deux ou trois vers, ici ou là, comme deux tranches de mandarine d’hiver…

Jean-Jacques Marimbert – sa biographie le dit – est un homme à plusieurs vies, donc, un poète !