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Roman

Bleu corbeau, Adriana Lisboa

Ecrit par Victoire NGuyen , le Samedi, 21 Septembre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Métailié, La rentrée littéraire

Bleu corbeau, traduit du portugais (Brésil) par Béatrice de Chavagnac, 19 septembre 2013, 222 pages, 18 € . Ecrivain(s): Adriana Lisboa Edition: Métailié

A la recherche de son identité


Les éditions Métailié offrent aux lecteurs une occasion de (re)découvrir un auteur de talent, Adriana Lisboa. En effet, avec Bleu corbeau, elle nous entraîne dans les pérégrinations d’une petite fille orpheline, Evangelina, qui à la mort de sa mère part aux Etats-Unis à la quête de son père biologique.

« Ce n’était pas une aventure. Ce n’était pas des vacances, ni une diversion, ni un passe-temps, ni un changement d’air, je partais aux Etats-Unis pour habiter chez Fernando avec un objectif bien particulier en tête : chercher mon père ».

Mais qui est donc Fernando ? Cet homme au passé sombre et tragique est l’ex-mari de sa mère. Le duo que forme Fernando avec l’enfant permet à l’auteur de mettre face à face deux destins : celui de ce père de circonstance et la petite fille esseulée. Et c’est au contact de cet homme qui la sauve de la solitude qu’elle va s’interroger sur le sens de l’existence hissant ainsi sa réflexion d’enfant à une dimension quasi métaphysique :

Canada, Richard Ford

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 19 Septembre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, L'Olivier (Seuil), La rentrée littéraire

Canada, traduit de l’anglais (USA) par Josée Kamoun 22 août 2013, 478 p. 22,50 € . Ecrivain(s): Richard Ford Edition: L'Olivier (Seuil)

 

Il arrive rarement de savoir – en lisant un livre pour la première fois – qu’on a dans les mains un grand roman que nos descendants liront dans des décennies (siècles ?) encore. Canada est un livre immense, porté par le souffle éternel du grand roman initiatique à l’américaine, et hanté par les ombres tutélaires de Mark Twain ou de Charles Dickens. Plus proche, l’ombre du grand Raymond Carver, dont Ford fut l’ami. On peut se demander si Ford n’écrit pas là le roman que Carver n’a jamais écrit.

Roman d’apprentissage donc pour le jeune Dell , roman d’apprentissage de la vie passant par un dédale d’épreuves majeures. Avec Ford, on le savait depuis « Une mort secrète » (1976), le chemin de la vie n’est jamais une voie de gala mais un long chemin de souffrances. Il déclarait en 2002, dans une interview à un magazine français (Télérama) : « Les Américains aiment le bonheur. Moi, j'écris la désespérance. ». Mais qu’on ne s’y trompe pas : Ford écrit le malheur avec une énergie, une vitalité, une puissance qui portent en elles l’incroyable déferlement de son écriture et la simplicité limpide des choses de la vie.

Dis-leur qu’ils ne sont que cadavres, Jordi Soler

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 19 Septembre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Belfond, La rentrée littéraire

Dis-leur qu’ils ne sont que cadavres, traduit de l’espagnol (Mexique) par Jean-Marie Saint-Lu, septembre 2013, 236 pages, 18 € . Ecrivain(s): Jordi Soler Edition: Belfond

 

Eh bien, voilà un livre à plusieurs entrées – toutes, portes riches –, qui nous permet ainsi, plusieurs voyages. Pas vraiment étonnant, avec la signature poétique, et burlesque de Jordi Soler – un des grands noms de la littérature espagnole actuelle ; un barroco à la hauteur des grands retables de Salamanque.

Il y a l’entrée – Irlande ; magnifique, musicale, éclairée, comme il se doit par cet Irlandais d’adoption qu’est J. Soler, qui vous la décline à tous les parfums de l’infini de ses bières : « la tourbe… est vendue en lingots sombres dans les supermarchés, se place dans la cheminée ou le poêle, comme si c’était un tas de rondins ». Odeurs, pluie, une Irlande-de-livre…

Il y a l’entrée – Mexique ; couleurs violentes d’un baroque bavard et mystérieux, dans lequel, par moments, passe le souvenir de cet autre hispanisant, l’écrivain chilien Hernan Rivera Letelier, dans son inoubliable Art de la résurrection. Soler, là encore, est en pays de connaissance ; il est de ce pays.

Confiteor, Jaume Cabré

Ecrit par Yann Suty , le Mercredi, 18 Septembre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Espagne, Actes Sud, La rentrée littéraire

Confiteor (Jo Confesso), Trad. du catalan par Edmonde Raillard (août 2013). 782 p. 26 € . Ecrivain(s): Jaume Cabré Edition: Actes Sud

 

 

« C’est incroyable comme les choses les plus innocentes peuvent engendrer les tragédies les plus improbables. »

Un tour de force. Confiteor est une impressionnante saga grâce à une narration spectaculaire, enlevée, complexe, mais toujours fluide. Jaume Cabré est un virtuose qui jongle entre les personnages et les époques. On voyage du Barcelone actuel au Moyen Age, en passant par l’Inquisition, l’après-guerre espagnole, l’Allemagne nazie ou Auschwitz. Mais (et c’est là, le plus fort), c’est d’une phrase à l’autre, d’un paragraphe à l’autre, que l’auteur fait un bond de trente en arrière (ou de cinq cents ans !), revient au présent, avant de continuer à nous balader à travers les méandres de l’Histoire.

De la même manière, il passe aussi du « il » au « je », du « je » au « il », donnant ainsi un nouvel éclairage, une distance, ou bien renforçant le côté subjectif de la narration, sa proximité avec les personnages.

La longue attente de l’ange, Melania G. Mazzucco (2ème critique)

Ecrit par Anne Morin , le Mercredi, 18 Septembre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Flammarion, La rentrée littéraire, Italie

La longue attente de l’ange, traduit de l’italien par Dominique Vittoz, 4 septembre 2013, 446 pages, 22 € . Ecrivain(s): Melania G. Mazzucco Edition: Flammarion

 

La lutte de Jacob – Jacomo est le prénom du Tintoret –… si ce tableau ne figure pas au nombre des toiles peintes par le Tintoret à la Scuola Grande San Rocco, sans doute est-ce celle qu’il crée, pas à pas, dans l’œuvre de Melania Mazzucco, La longue attente de l’ange.

L’ange… sa fille, Marietta née de ses amours avec Cornélia, une prostituée allemande, qui viendra le chercher dans une ultime vision, non dans un ciel d’Ascension mais dans une plongée dans l’eau saline, sournoise et omniprésente à Venise :

« Madame Marietta disait que Venise est une ville sans racines, dangereuse et secrète, car personne ne peut voir ni connaître sa partie la plus importante, ce qui la soutient, ses fondations en somme, qui sont englouties et cachées comme nos pensées les plus troubles et nos désirs inavouables » (p.221).

Marietta, à la fois trop présente et désincarnée. N’est-elle pas l’Etincelle du peintre, celle qui aussi bien, également, peut faire jaillir le feu et son idée, l’imagination et l’image ? Même après s’être résolu à la marier, le Tintoret la veut près d’elle, aussi installe-t-il le jeune couple dans un appartement situé au-dessus du sien, la réplique du sien :