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Les Livres

Vrouz, Valérie Rouzeau

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Jeudi, 30 Mai 2013. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, La Table Ronde

Vrouz, « poésie », 2012, 170 pages, 16 € . Ecrivain(s): Valérie Rouzeau Edition: La Table Ronde

 

Valérie Rouzeau est une poétesse extrêmement reconnue dans le monde des lettres, depuis le bouleversant Pas revoir, qui est l’un des livres les plus justes écrits sur l’expérience du deuil. L’un des livres les plus justes car parvenant à inventer au fur et à mesure une forme qui, en se déployant (et en se déployant de telle sorte qu’elle soit invention perpétuelle), échoue à se construire. Cette forme étant essentiellement faite de brisures, de bafouillage, de silence, de non-dit. Or, c’est là justement la prouesse de l’auteure. Car cette forme est seule à même de pouvoir dire quelque chose de la mort. Dans ses manques manifestes, elle parvient à capturer l’impossibilité dans laquelle se tient tout auteur d’élaborer un discours sur la mort, sur la perte, un discours pouvant rendre perceptible, à quelque niveau que ce soit, le manque foudroyant qui reste dedans le cœur comme un orage, quand quelqu’un de proche, d’aimé, suspend la mélodie de son être dans le grand lointain.

Il y a peu, Rouzeau a publié Vrouz, des sonnets qui n’appartiennent qu’à elle, et qui disent avec une grande humanité (1) et une grande sincérité l’être plongé dans le quotidien, dans son cours, qui le plus souvent remue, jusqu’au tréfonds parfois, quand la méchanceté est de la partie, par exemple.

La bouche qui mange ne parle pas, Janis Otsiemi

Ecrit par Theo Ananissoh , le Jeudi, 30 Mai 2013. , dans Les Livres, Recensions, Polars, La Une Livres, Roman, Jigal

La bouche qui mange ne parle pas, septembre 2012, 171 pages, 8 € . Ecrivain(s): Janis Otsiemi Edition: Jigal

 

 

L’un est un policier et l’autre, un malfrat qui vient de braquer une agence bancaire. Le flic prend en otage le complice du braqueur et réclame une part du gâteau. Le braqueur, très dégoûté, paye la rançon en déposant l’argent dans un bac à poubelle.

 

« – J’ai vu ton colis. Si tu es dans le coin, tu peux venir récupérer ton copain Dodo.

– Il sait où me trouver.

– Ça a été un plaisir de faire affaire avec toi, Jimmy.

– Ce n’est pas un plaisir partagé ».

Le doux parfum des temps à venir, Lyonel Trouillot

Ecrit par Victoire NGuyen , le Mercredi, 29 Mai 2013. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Poésie, Actes Sud

Le doux parfum des temps à venir, Editions Actes Sud, Collection Essences, mars 2013, 60 pages, 13,50 € . Ecrivain(s): Lyonel Trouillot Edition: Actes Sud

 

 

Les promesses de l’aube

 

Le doux parfum des temps à venir est un texte poétique d’une soixantaine de pages. Sans précision de lieu ni d’époque, une mère sentant sa mort imminente, décide de parler à sa fille. Le lecteur apprend au fil de ce monologue le parcours tragique de cette femme qui porte en elle le poids de la faute et la colère des foules : « Un jour, / dans une grande ville ou dans un bourg, / mais qu’importe le lieu, / des hommes m’ont prise pour une vache ou pour une esclave. / Ils me levèrent de ma couche, / m’ont traînée sur une place, / et comme pour l’exemple, / ils ont donné ma nudité en spectacle à la foule / et marqué mon épaule de la fleur de la honte ».

Blaise Cendrars/Henry Miller (1934-1959)

Ecrit par Frédéric Aribit , le Mercredi, 29 Mai 2013. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Zoe, Correspondance

Blaise Cendrars, Henry Miller (1934-1959), Je travaille à pic pour descendre en profondeur, 2013, 346 pages, 27,50 € Edition: Zoe

C’est le 14 décembre 1934 que Blaise Cendrars et Henry Miller se rencontrent, à Paris. Y en-a-t-il beaucoup dans une vie, des rencontres comme celles-là ? Blaise Cendrars, déjà auréolé d’une belle notoriété de poète, d’écrivain révolutionnaire et d’aventurier, vient de lire le Tropique du Cancer, premier roman enfin publié par cet inconnu de 44 ans, qui se décrit volontiers comme un « raté accompli », vivant sa vie de bohème parisienne au crochet des femmes de sa vie. Et Cendrars est enthousiaste. « Livre royal, atroce, exactement le genre de livres que j’aime le plus… ». En une soirée, en une nuit de discussion et d’échanges, le ton est donné. Jamais ils ne se départiront l’un de l’autre, même si leur relation connaîtra quelques éclipses durables.

Editer, ou rééditer aujourd’hui la correspondance de ces deux phénomènes de la littérature du XXe permet de mesurer l’intensité d’une amitié rare, et de lire comme le filigrane de deux œuvres parallèles, distinctes et similaires à la fois, engagées chacune dans le difficile processus de l’écriture de soi qu’on aime appeler désormais « autofiction ». Travail de recherches inabouties (les lettres disparues de Cendrars de 34 à 39), de classement et de croisements (les datations à l’anglaise ou à la française pouvant varier chez Miller), scrupuleux travail de fourmi pour donner à entendre quelque chose de cette admiration sans faille de Miller, et de cette liberté échevelée de Cendrars, probablement moins débordant dans l’éloge, moins ostensiblement « littéraire » dans l’exercice de la lettre privée.

Configuration du dernier rivage, Michel Houellebecq (2ème recension)

, le Mercredi, 29 Mai 2013. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Poésie, Flammarion

Configuration du dernier rivage, 99 pages, avril 2013, 15 € . Ecrivain(s): Michel Houellebecq Edition: Flammarion

 

Célébré dans le monde entier, Michel Houellebecq passe pour le plus grand auteur français vivant (le plus grand auteur mort étant Bernard-Henri Lévy qui, heureusement, n’écrit pas de poésie).

Configuration du dernier rivage se compose de cinq parties, la plus belle étant certainement la quatrième : « les parages du vide » dans laquelle l’auteur raconte ses amours défuntes et qui contient quelques poèmes magnifiques.

Car – étonnant non ? – Houellebecq fait du Houellebecq. Comme dans La carte et le territoire où les pages superbes voisinaient avec les notices d’appareils électroniques ou les emprunts wikipediesques, il a dissimulé dans ses poèmes quelques belles fleurs au milieu des chardons.

Il est ainsi capable de pondre des alexandrins aboutis, parfois magnifiques mais dans le poème suivant d’infliger un treizain à ses lecteurs perplexes.