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La Une Livres

Coco et la fusée, Romain Jallon, Lucille Placin (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mardi, 04 Juin 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Jeunesse

Coco et la fusée, Romain Jallon, Lucille Placin, éditions L’Étagère du bas, mars 2024, 24 pages, 11,50 €

Les cosmonautes

Ce plaisant livre d’art jeunesse est le fruit d’une collaboration entre Lucille Placin, l’illustratrice, née en 1981 à Bordeaux, diplômée de la célèbre école Émile Cohl de Lyon et de l’auteur Romain Jallon, né en 1982, ingénieur et docteur en mathématiques, qui a créé en 2023 le personnage de Coco, ainsi que la série Les Mondes de Coco. L’album de format carré (19x19 cm) est donc le 3ème de la série des 6 albums : Coco et la petite souris, Coco et le sous-marin, et à paraître : Coco au centre de la terre, Coco et son hydravion et Coco et le tapis volant.

Le livre se manipule facilement, bel objet de collection à ranger dans sa bibliothèque personnelle. Les couleurs appliquées par Lucille Placin sont acidulées, variées, vives, recherchées. L’orange est tonique et apporte de l’énergie et de la joie de vivre, le rose est lié à l’enfance et à l’innocence ; ici, le bleu s’associe au rêve et au voyage, le vert à la vie, à la nature et également à l’étrangeté. Le bleu de la stratosphère est aussi un symbole d’infini, associé à la connaissance et à l’intelligence ; le noir sidéral, au mystère et à l’absence de lumière.

José Ortega y Gasset, Penseur de l’Europe, Béatrice Fonck (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 03 Juin 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Biographie, Les Belles Lettres

José Ortega y Gasset, Penseur de l’Europe, Béatrice Fonck, Les Belles-Lettres, 2023, 478 pages, 25,90 € Edition: Les Belles Lettres

 

Autant un lecteur relativement cultivé n’aurait guère de difficulté à citer un philosophe grec, français ou allemand, autant il serait en peine de nommer un penseur espagnol et, s’il y parvenait, prononcerait probablement le nom de José Ortega y Gasset (Vivès, le contemporain d’Érasme, étant à peu près – bien qu’à tort – oublié). Ortega eut en commun avec Vivès d’avoir vécu une partie de son existence hors de son pays natal (celui-ci repose d’ailleurs à Bruges, après avoir enseigné en Grande-Bretagne et mené la vie gyrovague des humanistes).

Ortega y Gasset (1883-1955) n’est pas tout à fait inconnu en France : même si un projet d’Œuvres complètes traduites (aux éditions Klincksieck) a fait long feu, il existe des ouvrages de synthèse, comme ceux d’Alain Guy (Seghers, 1969) et de Juan Manuel Monfort Prades (RBA, 2016 : il était possible de l’acquérir dans les relais de gare). Ortega est, dans l’ensemble, connu (mais également occulté) par un seul livre, La Révolte des masses (Stock, 1961 ; Les Belles-Lettres, 2010), alors qu’il a énormément écrit.

Le Bestiaire III, de Marcel Broodthaers (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 30 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, L'Atelier Contemporain

Le Bestiaire III, de Marcel Broodthaers, Poèmes, 1960-63, L’Atelier contemporain, Écrits d’artistes, mars 2024, 208 pages, 30 € Edition: L'Atelier Contemporain

« Le signifiant se produisant au champ de l’Autre fait surgir le sujet de sa signification. Mais il ne fonctionne comme signifiant qu’à réduire le sujet en instance à n’être plus qu’un signifiant, à le pétrifier du même mouvement où il l’appelle à fonctionner, à parler, comme sujet »

(Lacan, Séminaire 11, pages 188-189).

Traité sur les animaux

Marcel Broodthaers est un artiste reconnu (né le 28 janvier 1924 à Bruxelles et décédé le 28 janvier 1976 à Cologne), aux œuvres transgressives et oniriques, dont les célèbres Moules. Compactés dans plusieurs pièces, les lamellibranches, groupés de façon compacte – voir la Grande casserole de moules et Chaudron (1966-68) –, forment un objet détourné de ses fonctions premières, dans la lignée de Marcel Duchamp et également du surréalisme de René Magritte. Cela dit, cette nouvelle édition posthume du Bestiaire provient d’un premier choix argumenté de Jean Daive en 1985 (revuiste, journaliste et producteur de Peinture fraîche sur France Culture) et de Maria Gilissen-Broodthaers (présidente de la Fondation Marcel Broodthaers).

L’Arnitoile, En attendant la Parque, Patryck Froissart (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Jeudi, 30 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions

L’Arnitoile, En attendant la parque, Patryck Froissart, Sinope éditions, septembre 2023, 92 pages, 8 € . Ecrivain(s): Patryck Froissart

 

L’Arnitoile, comme l’indique son titre (désignant une toile d’araignée en wallon), est un ouvrage totalement atypique. Les mots, reliés par des associations sémantiques ou phonétiques, tissent une poésie dont l’hermétisme rappelle au premier abord celui de Mallarmé, mais dont le message se révèle peu à peu, au fil des pages.

Le lecteur est happé par ces formes étonnantes, ces « toiles » d’encre qui évoquent aussi, indirectement, le piège de la destinée humaine dans lequel les êtres naissent et demeurent prisonniers jusqu’à leur mort. Ils attendent en quelque sorte la Parque, celle qui coupera tôt ou tard le fil des vies. À cet écho mythologique s’ajoute une référence aux apollons d’un Éden furtif condamné à la disparition, comme tout en ce monde, après la « flambée des effusions ».

On frôle le nihilisme avec cette « farce crasse » que serait peut-être l’existence, où tout finit, inévitablement, « fatalement » par « s’affroidir », dans « l’haleine rauque et rance de la désespérance », là où « la lumière n’est qu’à l’amont du tunnel » et où, « plus on avance, plus on « s’enténèbre ».

Le Plaisir de lire des romans, Daniel Mortier (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mercredi, 29 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Classiques Garnier

Le Plaisir de lire des romans, Daniel Mortier, Classiques Garnier, 2023, 258 pages, 32 € Edition: Classiques Garnier

 

À bien des égards, le roman est un genre littéraire paradoxal, ne serait-ce que dans la mesure où, apparu tardivement et plus ou moins méprisé pendant des siècles par rapport aux « grands » genres, aux genres nobles qu’étaient la tragédie et l’épopée, il a pris une revanche aussi éclatante qu’écrasante : à peu près tout ce qui se publie depuis un moment déjà sous l’appellation de « littérature » (en dehors, donc, des documentaires, des essais et des ouvrages pratiques) appartient au genre romanesque ; la poésie et le théâtre se trouvant, en dehors des classiques, réduits à la portion congrue. Non seulement le roman a remplacé les autres genres littéraires, à la manière d’une espèce invasive – animale ou végétale – qui supplanterait des espèces de longue date acclimatées, mais encore, comme le remarquait Bakhtine, le roman a annexé et phagocyté les autres genres littéraires. La Mort de Virgile en est un exemple magnifique, même si cette œuvre symphonique ne ressemble que de loin à ce qu’on appelle en général un roman.