La lumière est à moi, et autres nouvelles, Gilles Paris (par Philippe Leuckx)
La lumière est à moi, et autres nouvelles, Gallimard coll. Haute enfance, octobre 2018, 208 pages, 19 €
Ecrivain(s): Gilles Paris Edition: Gallimard
La sensualité adolescente retrouvée. Deux garçons pour une fille. L’été comme un frisson.
Dans la langue, on renoue avec l’intime, cette « lumière est à moi », nous suggère le titre, celle du corps, du cœur, et de ce touché d’une cible si difficile à nommer quand elle vibre au loin à l’intérieur.
Du surplomb de l’enfance – au sens large, petite et adolescence –, Gilles Paris découvre des consciences fines.
La grâce de l’écriture fait le reste.
La longue nouvelle, Eytan, qui déroule ses errances et beautés relationnelles sur les îles Lipari, surtout, comme « Les enfants de chœur ».
Beaucoup de poésie, d’âpreté. Nombre de regards d’adolescents, de jeunes filles, légèrement en décalage, avec une perception aiguë des adultes qui virevoltent autour d’eux.
L’auteur, la soixantaine récente, renoue avec l’été, l’enfance, ce lointain en nous juste rattrapable.
Le monde de l’enfance est un étrange espace d’imagination, en éveil ou en péril. On peut y mentir, édifier des rêves de famille, faire vivre ou mourir, concevoir des fêtes, relever des défis. Dans certaines de ces nouvelles, où il est beaucoup question de géniteurs plus ou moins agréables, plus ou moins consentants, plus ou moins adultes, les objets ont une âme, les arbres parlent, et « la lumière est à moi » tient sans doute du miracle de l’enfant qui sent soudain la vie refaire surface.
Gilles Paris déroule la vie telle que la société la propose, avec ses familles éclatées, ses papas et mamans en quête de bonheur, ses enfants, au demeurant, souvent témoins de ce qui les dépasse, enfants et adolescents destinés sans doute à mûrir plus vite dans un monde qui bouge, change, déroute.
Entre âpreté et descriptions poétiques de villégiatures, de milieux protégés, l’écriture de Gilles Paris cerne la beauté qui souffre, l’attente, le rêve, l’imaginaire fécond des enfants que nous sommes restés, perdus et égarés, à l’aune de la vie « faite de rencontres surprenantes ».
Philippe Leuckx
- Vu : 1752