La classe verte, Benjamin Pitchal
La classe verte, février 2018, 304 pages, 21 €
Ecrivain(s): Benjamin Pitchal Edition: GallimardBenjamin quitte le lycée, le baccalauréat en poche. Alors que ses parents rêvent de le voir s’enferrer dans des études supérieures, il n’aspire qu’à la liberté, celle des voyages, de la poésie, de la Grande Vie, qu’il conçoit de bohème mais sans les désagréments du « sans-le sou ». Il trouve auprès de son grand-père biologique, Alain Gheerbrant, une oreille attentive et bienveillante, ainsi qu’un allié précieux dans la voie qu’il s’est choisie : tumultueuse, chaotique, constellée de toutes les promesses que la jeunesse entrevoit, et avant tout libérale pour ne pas dire libertaire. Explorateur et homme de lettres, le vieil homme espère bien transmettre à ce petit-fils tombé du ciel sa passion pour la littérature, ainsi que toutes les ficelles de son ancienne profession. Fasciné par le destin exceptionnel de celui qui explora l’Amazonie et fut l’éditeur d’Antonin Artaud, Benjamin voue à ce grand-père charismatique une réelle et tendre admiration, et se laisse bien volontiers enivrer par ses récits, conseils et anecdotes distillés au cours de déjeuners gastronomiques bien arrosés, et qui, toujours, convoquent d’illustres personnages, tels que Paulhan, Gide, Breton, Bataille ou encore Césaire. Si Alain lui prodigue sa propre conception du surréalisme et l’encourage dans sa vocation poétique (« Quelles que soient les circonstances, il faut toujours prendre le parti de la révolte. Tel aurait dû rester le principal enseignement du surréalisme »), Benjamin s’aventurera malgré tout dans des voyages beaucoup plus périlleux que l’engagement intellectuel prôné par son grand-père.
Roman d’apprentissage, roman picaresque, mais surtout roman résolument moderne dans sa facture et par ses thèmes, La Classe vertedéroule une véritable épopée contemporaine, jetant des ponts inattendus entre la nostalgie des milieux intellectuels et lettrés de la première moitié du XXème siècle, et l’ultra-réalisme des combines mafieuses liées au trafic de haschisch.
Passant tour à tour de l’ombre à la lumière, sans jamais perdre l’amour inconditionnel que lui témoignent les siens, Benjamin n’aura finalement d’autres choix que ceux qu’il aura lui-même initiés par ses actes : « Alors c’est ça la grande vie ? Faire semblant de n’attacher aucune importance aux conséquences de ses actes… ? ».À l’heure du bilan, quels enseignements tirera-t-il de ses multiples expériences ? À n’en point douter, quelques grands préceptes littéraires : « Pour devenir effective, une vérité doit d’abord être éprouvée. L’écriture est un des lieux de cette épreuve. On donne naissance à une œuvre, celle-ci se développe, prend son autonomie, et l’on se retrouve à écouter sa propre création vous parler de vive voix. Auteur, personnage, il faut se soumettre à son narrateur ».Quant au reste, c’est avec l’écrivain qu’il est devenu qu’il règlera ses comptes…
Christelle D’Hérart-Brocard
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