Wake up America, Tome 2, 1960-1963, John Lewis, Andrew Aydin, Nate Powell
Wake up America, Tome 2, 1960-1963, éd. Rue de Sèvres, mai 2015, trad. (USA) Alex Nicolavitch, 192 pages, 14 €
Ecrivain(s): John Lewis, Andrew Aydin, Nate Powell
Récit de la vie et du combat de John Lewis, infatigable défenseur des droits civiques et de la liberté, Wake up America est le second tome d’une trilogie, illustrée par Nate Powell, scénarisé par Andrew Aydin et John Lewis. Il fait suite au tome 1 dont la période englobait de 1940-1960 et montrait le début des sit-in et des actions non-violentes.
Wake up America, c’est aussi le cri de ralliement de John Lewis dans la marche en avant vers la liberté et l’égalité et contre la discrimination raciale, comme l’était juste, après lui, celui de Martin Luther King : I have a dream.
« Nous marchons en ce jour pour des emplois et pour la liberté mais il n’y a pas de quoi être fiers : des centaines de milliers de nos frères ne sont pas là. Ils n’avaient pas d’argent pour le transport car ils reçoivent des salaires de misère et parfois pas de salaire du tout ».
Ce second tome évoque la mobilisation de plusieurs étudiants noirs contre les lois ségrégationnistes des Etats du Sud dans les années 1960-63. L’ouvrage s’ouvre à la date du 30 janvier 2009 sur l’illustration d’une large poignée de main entre un noir que l’on devine être John Lewis et un blanc dont on apprend à la page suivante qu’il s’appelle Maurice. Nous sommes à la Chambre des représentants et John Lewis assiste à la cérémonie d’investiture du premier président noir des Etats-Unis d’Amérique, Barack Obama.
Commence alors le long récit de John Lewis et de la cause qu’il défend toujours aux côtés de Barack Obama et qui jamais ne devra faiblir tant qu’il y aura des opprimés dans le monde.
A Nashville Tennessee, le 10 novembre 1960, John Lewis, alors étudiant, abandonne ses études de maîtrise et devient secrétaire local du CORE. C’est alors que va démarrer sa lutte contre la ségrégation envers les Afro-américains. Il sera le premier à manifester contre les exactions contre les noirs dans les gares routières du Sud et sera passé à tabac pour avoir osé remettre en cause les lois raciales des Etats du Sud.
Dans ce récit, Lewis avouera avoir souvent vu la mort de près. C’est une présence discrète mais non résignée, dans les files d’attente, devant les cinémas ségrégationnistes, dans les manifestations pacifiques où la recrudescence de la violence ira crescendo, que Lewis n’abandonnera jamais sa conviction que c’est par la non-violence et par l’action qu’il faudra continuer, « nous allons marcher », la marche symbolisera alors ce recours pacifique vers la liberté. Arrêtés plusieurs fois, conscients des dangers et des nombreux échecs (passages à tabac, fusillades, humiliations) que représentait leur lutte sans violence, ils ont continué leur marche vers le Sud. Leur persévérance même dans l’échec a fini par faire connaître leur mouvement imperceptiblement. En neuf mois, le mouvement deviendra cause nationale.
L’illustration noir et blanc de cette bande dessinée laisse une large place à l’action pacifiste des partisans de la liberté et l’égalité mais révèle aussi la violence commise contre le peuple noir. La couleur noire dominante, souvent justement dans les attaques de plus en plus nombreuses, révèle en même temps la force de ces combattants qui, dans l’adversité, expriment une sagesse héroïque qui les rend plus forts et maîtres de leur destin. Les images liées à l’humiliation en sont la plus forte illustration. Marcher la tête haute, ne pas répondre aux coups, clamer la paix et continuer à chanter jusque dans les prisons les plus dures (pénitencier du Mississipi appelé « ferme de Parchman »).
Ce sont des images cruelles, des réactions violentes de la part des blancs auxquelles le clan de Lewis opposera un stoïcisme exemplaire, le mot d’ordre de John Lewis ayant été pendant plus de quarante ans un message de paix et de non-violence. Par ce récit haletant dans cette bande dessinée (ado-adultes) en noir et blanc menée comme un récit d’aventures, les jeunes gens pourront s’approprier l’histoire de John Lewis en s’identifiant à sa cause noble.
Marie-Josée Desvignes
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