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Voyages avec l’absente, Anne Brunswic

Ecrit par Stéphane Bret 06.06.14 dans La Une Livres, Actes Sud, Les Livres, Critiques, Récits

Voyages avec l’absente, mai 2014, 196 pages, 20 €

Ecrivain(s): Anne Brunswic Edition: Actes Sud

Voyages avec l’absente, Anne Brunswic

 

C’est un récit particulier que nous livre Anne Brunswic, celui d’une tentative d’explication, d’éclairage de la vie de sa mère, Françoise Tuchband, disparue en 1959 lorsque la narratrice avait huit ans. Le récit est articulé autour de lettres, imaginaires, écrites à cette mère absente, et s’appuie également sur des archives familiales, celles de son père, Henri Brunswic. Pourtant, le cadre purement familial est loin d’être l’unique thème de ce récit. Pendant la Seconde guerre mondiale, l’histoire de la famille d’Anne Brunswic passe en effet par Bruxelles, un séjour à Paris, puis en Bretagne. Le franchissement de la ligne de démarcation précède l’embarquement vers le Portugal, puis Londres comme destination finale.

Anne Brunswic évoque aussi les origines de sa famille maternelle en Lituanie, ce qui est prétexte à un examen de l’histoire de cette partie de l’Europe, si souvent sujette à des changements de frontière, de nom, d’appartenance politique.

Elle rappelle également sa situation d’enfant, le « numéro 3 », dans une famille aux résidences multiples. La lecture du chapitre relatant le transit de sa famille à Caldas da Rainha nous apporte quelques éclairages sur le rôle du Portugal pendant la guerre : « Sur un point, tous les réfugiés qui fuyaient l’Europe occupée par les Nazis, le Portugal était un paradis ! (…) Et un havre de sûreté car, malgré des demandes pressantes, les autorités portugaises – sur ce point et sur beaucoup d’autres, infiniment plus clémentes que le régime de Vichy – n’ont jamais livré personne aux nazis ».

Anne Brunswic pointe également la volonté d’ascension sociale de sa mère, le désir de la reconnaissance de la réussite par ses acquisitions immobilières prestigieuses : « En dix ans, tu seras passée de la porte de Champerret à la Place Malesherbes, la distance de trois stations de métro et d’à peine un kilomètre mais une véritable frontière sociale (…) Ou bien cherchais-tu à combler, à devancer même, les appétits – de standing, de respectabilité, d’honneurs, d’argent – de ton insatiable mari ? ».

On y découvre aussi l’une des sources de la souffrance de l’auteure : l’absence, la distance affective : « Tu étais déjà une mère absente. Absente à l’heure des câlins. Absente pendant les vacances d’été que tu passais en général seule avec papa, confiant tes rejetons aux parents, aux amis, ou, à défaut à des homes d’enfants ».

Le prologue et l’épilogue de ce récit, un dialogue posthume avec son père, sont marqués par l’omniprésence de la douleur, de l’amertume. Pourtant, Anne Brunswic parvient à éviter l’écueil, toujours possible dans ce genre de récit, du jugement définitif, en reliant son histoire personnelle à celle du monde, à l’histoire contemporaine, au rapport à la judéité, à la sincérité personnelle.

 

Stéphane Bret

 


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A propos de l'écrivain

Anne Brunswic

 

Depuis 2003, Anne Brunswic a voyagé en Palestine, en Russie et en Bosnie. Ses reportages ont été accueillis dans La Pensée de Midi, La Lettre internationale, Le journal des Lointains et sur la Radio Suisse Romande. A Paris, elle partage son temps entre l’enseignement, la critique de cinéma et l’écriture. Derniers livres parus : Bienvenue en Palestine, chroniques d’une saison à Ramallah (Actes Sud, 2004, Babel n°755. Prix RFI Témoin du monde, 2004), Sibérie, un voyage au pays des femmes (Actes Sud, 2006) et Les eaux glacées du Belomorkanal (Actes Sud, 2009).

 

A propos du rédacteur

Stéphane Bret

 

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63 ans, réside actuellement à Boulogne-Billancourt, et s’intéresse de longue date à beaucoup  de domaines de la vie culturelle, dont bien sûr la littérature.

Auteurs favoris : Virginia Woolf, Thomas Mann, Joseph Conrad, William Faulkner, Aragon, Drieu La Rochelle, et bien d’autres impossibles à mentionner intégralement.

Centres d’intérêt : Littérature, cinéma, théâtre, expositions (peintures, photographies), voyages.

Orientations : la réhabilitation du rôle du savoir comme vecteur d’émancipation, de la culture vraiment générale pour l’exercice du libre arbitre, la perpétuation de l’esprit critique comme source de liberté authentique."

 

REFERENCES EDITORIALES :

Quatre livres publiés :

POUR DES MILLIONS DE VOIX -EDITIONS MON PETIT EDITEUR 
LE VIADUC DE LA VIOLENCE -EDITIONS EDILIVRE A PARIS
AMERE MATURITE -EDITIONS DEDICACES 
L'EMBELLIE - EDITIONS EDILIVRE A PARIS