Trop, Jean-Louis Fournier
Trop, juin 2014, 184 pages, 16 €
Ecrivain(s): Jean-Louis Fournier Edition: Editions de la Différence
Quand Jean-Louis Fournier nous dit « TROP », j’ai envie de lui répondre : Pas assez. On aurait aimé qu’il nous en présente encore, de ces trop, qui empoisonnent nos choix, donc nos vies. Il dresse un inventaire de tout ce qui est « de trop » dans notre mode de vie, une façon originale de mettre le doigt là où ça fait mal, c’est-à-dire sur les excès de notre société marchande et la confusion qu’elle engendre. Bien vu.
On peut faire confiance au marketing et à son bras armé qu’est la publicité pour avoir su décliner un produit en autant de sous-produits dont on se demande, avec l’auteur, quel en est l’intérêt. Bien entendu l’auteur a dû faire des choix pour établir sa liste, mais on peut s’étonner qu’il ait omis les lessives, exemple type de l’abondance de produits qui nous sont proposés.
Où est-il le bon vieux temps où la « ménagère de cinquante ans » reprisait les chaussettes du foyer avec un œuf en porcelaine ? On ne peut qu’être satisfait qu’elle n’ait plus à le faire, mais en conséquence, on ne sait plus quelle paire choisir, accrochées par lignes entières sur des portants, pour remplacer celles que nous avons trouées.
Ainsi, la profusion crée le désordre dans nos têtes et nous empêche de choisir. Tantôt notre main est guidée, tantôt elle est retenue.
A l’inventaire des biens matériels auraient pu s’ajouter d’autres notions : trop de normes, trop de règles, trop d’interdits, trop de morale, trop de discours… Je vous comprends Jean-Louis, vous avez eu peur de lasser mais, du coup, on reste un peu sur sa faim.
Et tant que j’y suis, si je peux faire un reproche à votre livre avec lequel je me suis régalé, c’est qu’il n’aborde pas les conséquences éthiques de ces « trop » de tout. Car si on y réfléchit, ce sont bien ces excès qui prennent les citoyens par le bout du caddie pour les conduire vers un abandon de leur sens critique. Le danger de la profusion se trouve dans ses conséquences comportementales et sociétales. Heureusement, de temps en temps, il y a des gens qui, comme vous, nous alertent. Merci, donc, pour cette piqûre de rappel.
Gilles Brancati
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