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Trois poèmes de Marianne Braux

Ecrit par Marianne Braux 28.05.18 dans La Une CED, Ecriture, Création poétique

Trois poèmes de Marianne Braux

Oraison

 

Vaquant

à la vue de l’autre monde

noir-transparence

dans les yeux d’une bête de somme

de même nature

l’homme d’outre-Rhin

à Turin pense

et parle d’horizons

L’homme du Rien trop pur

criant depuis les caves

qu’on le libère

qu’on regarde enfin son monstrueux visage de glaire

l’homme du Bien sans contraire

croule d’en finir avec

l’aveuglement des têtes rudes

des bourreaux en souffrance

des animaux trop sûrs

de vivre eux la vie dense

 

L’homme du Lien déchirable

coule en terre d’une volonté de puissance

venue de l’air

soumise à l’engeance

trop humaine

trop capable

 

Inondant les veines d’un monde possible en expansion

l’homme du Tiens

reçoit le noble appel du don

rompu à coups de bâton mou

vers un futur fuyant

 

L’homme du Viens au bord de l’explosion

se jette amoureux

sous le fouet du cocher fou

 

Sacre de l’automne

 

Dans la cacophonie inouïe des cacatoès

vus pour la première fois hier

de l’autre côté du monde

(sphère amie des cœurs départis

entre printemps et automne)

je suis encore

mon insertion criminelle dans leur partie au fait

de ce qu’ignorent les hommes

infâmes chasseurs du leurre sans états d’âme

 

Leur cris jamais dits

ouvrent mes pores lilas

au lacrimosa de leur enseignement animal

las sans le dire du mépris pour les bonnets d’âne

des mauvais élèves que nous sommes

 

L’air âcre de leur chant à peine symphonique

perce ma vie

au pays lisse des pâles visages

coupant d’un sourire commercial

écrasant de lunes froides

barrant d’une croix si peu méridionale

la nuit symbolique

 

Au diable leur rêve bien en ligne

Adieu géométrie ! venue d’en haut

je reste vivre ici-bas

parmi les autres hommes

parmi les oiseaux

 

Sonnée

 

A l’avant du monde en éclosion forcée,

Bondent les hommes un navire arrivé de là

- bas où les toges trop lourdes furent évincées,

en vertu d’un secret par-delà bien et mâle,

 

où d’autres hommes à tire d’aile et pieds à terre et

on voudrait oublier, abattirent les mâts

rigides, brandis vers un ciel sombre et mort-né,

de leurs chants comme une très vieille ballade.

 

(une promenade dans la main d’une femme

mère à l’ouïe voilée d’un enfant à venir,

claire orangeade des jours décomptés en nuits)

 

Je les regarde attendre l’ennui du voyage,

écourte mes phrases du son de leur frappe éprise

des voix sans passé, sonnée sur le bateau ivre.

 

Marianne Braux

 


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A propos du rédacteur

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Marianne Braux est docteure en littérature française et enseignante de français à Adélaïde en Australie.