Tempête sur la savane, Michaël Escoffier, Manon Gauthier (par Yasmina Mahdi)
Tempête sur la savane, Michaël Escoffier, Manon Gauthier, éditions D’Eux, mars 2020, 30 pages, 16 €
Un éléphant bougon
Michaël Escoffier, né en 1970, vivant à Lyon, auteur français d’une cinquantaine d’albums jeunesse, et Manon Gauthier, graphiste, née à Ste-Julie et vivant à Montréal (Prix Illustration Jeunesse 2007), ont réalisé le tout récent livre pour enfants, Tempête sur la savane, que publient les éditions D’Eux. Plusieurs illustrations occupent le format entier de l’album (24,2 x 34 cm), ce qui donne une visibilité importante à la sténographie et aux figures. La couverture cartonnée, doublée, d’une dominante sable, coloration qui annonce un paysage chaud, africain ou du sud, donne à voir un éléphant grincheux, survolé par des moustiques étonnés.
Le texte très court de Michaël Escoffier est constitué de phrases aux mots écrits en coloris distincts, vocable amusant et à double-sens : tant de tou/pet, trop con/tent de rous/péter, caca/huètes, cul/otté. Cela servira à l’enfant à repérer les césures, à formuler et enrichir un vocabulaire à partir de ces coupures. Il y retrouvera une comptine, chansonnette qui n’est pas sans évoquer les paroles de un éléphant, ça trompe, ça trompe… Dans Tempête sur la savane, les jeux de langage, les contresens sont réjouissants, divertissants pour les marmousets, sur le thème un peu égrillard des sanies et des interdits en public du corps et du parler comme : caca, péter.
Manon Gauthier applique la technique des papiers découpés (découpage plus collage). Elle organise un univers d’animaux de papier aux contours schématisés, qui portent des traces plastiques de fusain, de pastels gras, de traçages à la craie grasse blanche. Il s’agit de collages bruts sans effets décoratifs ou mignards. Il est possible de qualifier ce travail, d’assemblage, même si la narration est présente pour faciliter la compréhension d’un très jeune public. L’on y trouve la spontanéité reconstituée de dessins d’enfants, et c’est un paradoxe – dans le cas présent, cela est réussi.
L’éléphant véhicule de nombreux symboles, se retrouve comme logo et emblème. Le premier éléphant de fiction, Babar, créé par Cécile et Jean de Brunhoff, est aussi un des premiers héros de la littérature enfantine. Ici, l’éléphant rous/péteur de M. Gauthier va rencontrer maints animaux de la savane, sur terre et dans l’eau. Un conseil organisé par les bêtes aura lieu et les petits lecteurs et lectrices pourront observer, dénombrer et connaître le nom de chacun des habitants de cette terre à la végétation rare et clairsemée. La gamme chromatique, sobre, arbore des gris chauds, des noirs, des beiges et des jaune ocre. L’organisation textuelle, pour faire rire et travailler l’imaginaire, est élégante, bien lisible.
L’ensemble est plaisant, délicieusement impertinent, abordable dès l’âge de 4-5 ans.
Yasmina Mahdi
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