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Tableau de chasse, Arnaud Guillon

Ecrit par Martine L. Petauton 28.01.15 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Héloïse D'Ormesson

Tableau de chasse, janvier 2015, 206 pages, 17 €

Ecrivain(s): Arnaud Guillon Edition: Héloïse D'Ormesson

Tableau de chasse, Arnaud Guillon

 

 

« Tableau de chasse » ; c’est le titre, et, c’est adapté, car abattre symboliquement ce livre est ce qui surgit, comme quasiment la seule issue, la dernière ligne avalée.

Pourtant, quand on voit d’entrée le sujet : un huis-clos familial et bourgeois où ça joue aux quatre coins des sentiments, des postures et mensonges divers, on salive : un bon roman français ! comme seule, souvent, sait poser notre littérature. Quand on entre dans les premières pages, comme dans une piscine tiède où l’on soupçonne déjà de traîtres et froids courants, on est pour ainsi dire heureux de zieuter la belle résidence secondaire de Normandie (où il fait beau tout le temps ! Piège qui aurait dû nous avertir !). On s’attend, du reste, à voir débouler le journaliste de la Maison France-5 : – et ça, vous l’avez chiné où ?

On reste pourtant encore un peu ; la table est bonne ; quant au champagne ! Coule dans les allées le couple des parents, retraités, beaux, cultivés et la dose d’humour qu’il faut aux vieux couples pour durer ; celui de la génération seconde ; diplômée, aucun gramme en trop dépassant du maillot de bain, s’ennuyant un brin dans tout ce papier glacé ; enfin, le trublion, le encore beau-vieux, ou l’inverse, dont, curieusement, au bout du livre, on n’a pas la moindre idée de la couleur des cheveux, ou s’il portait ou non des lunettes… Ajoutons que tout ça va mijoter dans une sauce fortement jalouseuse, et que dans les tiroirs traînent des armes à feu. Belle et aurait dû être bonne, la salade, si…

Si, simplement, le registre n’avait pas été d’une platitude à lasser Brel en personne ; un millefeuille de plusieurs tempo aurait été plus que nécessaire / le réel plat, mais avec humour / une pincée de guignolesque / pourquoi pas quelques traits de suspense ? / et, nappant le tout, du nerf tendu à bloc, des fausses pistes, des labyrinthes – voyez ! Un honnête polar à l’américaine. On attend, mais ! rien. Pire, on s’enferre, on se noie dans la soupe, on ne se perd jamais – on a tout deviné d’entrée, et on donnerait cher pour que ce ne soit pas ça ! Mais, c’est tout bonnement ça. Et puis, pas un de ces bourgeois de revue chic à coiffeur non moins chic, ne nous arrime, ne nous capte – fut-ce une pincée de pages ! Ils ont beau changer de résidence (l’hiver, ils reviennent dans les beaux quartiers de Paris) ; toujours rien, ni de littéraire – on l’aura compris – ni même d’intéressant – le train, une longue attente chez le dentiste, un jour vraiment pluvieux. Même pas !

Le livre refermé, ça perturbe : serait-ce une erreur, dans une trame qui aurait pu… y-aurait-il un trentième degré qui échapperait ? Las ! Une erreur qu’on essaye de vendre comme un produit littéraire, ce ne serait pas, plutôt, l’autre nom de « arnaque » ?

L’auteur a déjà produit plusieurs romans, dont un qui eut le prix Roger Nimier ; on peut donc lui souhaiter un meilleur avenir littéraire.

 

Martine L Petauton


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A propos de l'écrivain

Arnaud Guillon

 

Arnaud Guillon, né en 1964. Plusieurs romans dont Ecume Palace, prix Roger Nimier en 2000.

 

A propos du rédacteur

Martine L. Petauton

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Rédactrice

 

Professeure d'histoire-géographie

Auteure de publications régionales (Corrèze/Limousin)