Rural noir, Benoît Minville
Rural noir, avril 2017, 307 pages, 7,20 €
Ecrivain(s): Benoît Minville Edition: Folio (Gallimard)
Après une absence de dix ans, Romain est de retour au lieudit Mouligny, commune de Tamnay-en-Bazois, dans la Nièvre, son berceau familial. Il y retrouve ce qui lui reste de famille : Chris, son frère, Julie la compagne de celui-ci et tous ses souvenirs de jeunesse.
Romain s’est enfuit brutalement à la mort de ses parents dans un accident de voiture, la vie avait perdu son sens. Éloigné de ses origines, il a voyagé, bourlingué, a grandi, s’est endurci. Aujourd’hui, lavé du goût trop salé des larmes que l’on a versées pour les choses et les êtres que l’on vous a arrachés trop tôt, il peut enfin remettre le pied sur la terre natale, y affronter le présent, l’avenir et surtout le passé, il est prêt. Chris, le cadet, après avoir devancé l’appel et s’être engagé dans l’armée, un rêve de gosse, a été démobilisé et le reçoit les bras grands ouverts. Il a conservé la maison des parents pendant l’absence de l’aîné. Il attend un enfant de Julie. Il s’est installé comme potier pour travailler le flammé morvandiau.
Au fin fond d’une campagne désertifiée, où la crise économique a bouleversé les paysages et les mentalités, les souvenirs ressurgissent. Loin de la simplicité d’antan, de la « douce » campagne aux odeurs de fermes, les villages asphyxiés par l’urbanisation tentent de survivre et l’économie souterraine a fait son apparition, le marché de la drogue s’est étendu et Nevers n’a jamais été aussi près de Tamnay. Ainsi Vlad, l’ancien ami, le frangin de cœur, celui que l’on surnommait le « captain », associé à Cédric, qui lui n’a jamais été un ami à part entière, mène désormais ses « affaires » avec ce dernier et les gars de Nevers. La Guibole, le Dalton, la ferme des Fauvé sont toujours là mais chacun dans son camp cependant. Attention on est peut-être plus pointilleux ici qu’en ville sur la notion de territoire. On connaît la valeur de la terre à la campagne !
Les américains ont fait un genre à part entière, avec les « rednecks », du polar rural. En France on a des histoires qui sans remonter à celle de La bande d’Orgères pourrait donner naissance à de « jolis romans ». De ces derniers il y en a même eu d’écrits, sur des tons différents, tel le Canicule de Jean Vautrin ou L’été en pente douce de Pierre Pelot.
Cette veine, entre autres, semble convenir à Benoît Minville, on attend donc de pouvoir le lire à nouveau.
Jean-Jacques Bretou
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