Requiem pour Gaza, Collectif (par Didier Ayres)
Requiem pour Gaza, Collectif, Color gang édition, coll. Urgences, 2018, préface Adonis, 120 pages, 13 €
Gaza
Pour chroniquer ce livre, proche peut-être de l’esprit d’une revue, qui émane de divers poètes et créateurs sur le thème des événements du 30 mars au 20 août 2018 en Palestine, il faut que j’écrive un incipit. Les propos de l’ouvrage, qui mettent en lumière le malheur historique et humain que traversent les habitants de la bande de Gaza – aux mains du Hamas – reprennent un point de vue : celui de ceux qui souffrent. Un regard en surplomb doit permettre de comprendre la complexité du rapport de Gaza au monde et du monde à Gaza. Et j’écris cela pour faire valoir une certaine prudence à l’endroit du conflit israélo-palestinien, qui m’occupe depuis très longtemps, en tout cas depuis l’adolescence – et j’avoue que la guerre du Liban faisait aussi partie de mes préoccupations politiques de l’époque. Cependant, il est heureux de voir combien cette problématique touchant le monde occidental et oriental, pose en même temps la question de la fonction de l’écriture comme témoignage.
Quoi qu’il en soit, ces contributions, assez courtes dans l’ensemble, sont introduites par une préface du grand poète Adonis, qui laisse entendre à mes yeux que c’est plus le poème que la politique qui interroge l’écrivain, nonobstant ici pour ce livre-témoignage, les textes les plus engagés, comme ceux de Bernard Noël ou de Julien Blaine (lequel m’a fait parvenir ce livre). C’est donc l’état des lieux de la vie à Gaza que relatent ici les écrivains, d’autant que l’ouvrage s’ouvre sur les noms des martyrs du Grand Retour.
Pour résumer en une formule simple, je dirai que ce livre factuel est écrit pour une cause universelle. Du reste, le choix d’indiquer à côté du nom de l’auteur son lieu de vie, où perce la pluralité des instances locutoires – différentes villes, différents pays, différentes expressions, différentes langues, différents sexes – permet de partager la déploration extrême de ce moment historique – en dépit du fait qu’Israël soit dirigé en partie par des politiciens d’extrême-droite – et laisse l’espoir d’un changement à venir, grâce à la diversité des désirs et des formes.
La littérature a une capacité exceptionnelle pour rendre sensible un événement avec vivacité, à rendre la vérité, à rendre vrais les fantasmes pacifiques d’un Gaza inconnu à nos yeux, et qui grâce à la littérature, fait de son martyr une apologie.
Ma sensibilité a été très sollicitée, et je dirai que le point de vue de Anne Letoré, qui a pris le parti de la métaphore d’une petite fille jouant à la marelle, passant dans le jeu du paradis à l’enfer, en enfreignant la frontière, me semble avoir valeur symbolique. Et comme je crois à la force des symboles, ce Soleil blanc et pierre rouge donne une tournure supplémentaire à la raison d’être de ce livre.
Didier Ayres
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