Purgatoire du quotidien, Cathy Garcia
Purgatoire du quotidien, éditions A tire d’ailes, 2014, 22 pages, 5 €
Ecrivain(s): Cathy GarciaUn « Purgatoire du quotidien » en rien soporifique, où la marque de fabrique de cet humour caustique pratiqué par l’éditrice-poète autodidacte des Nouveaux Délits, Cathy Garcia, se reconnaît dès l’ouverture de ce court et dense opus rafraîchissant, jubilatoire, couleur soleil noir. Un florilège de notes journalières sur la vie, le temps, le monde, les autres, etc. Roboratif, hors des sentiers battus, parfois subversif, toujours salutaire !
Cathy Garcia en annonce la couleur : « Si nous vivions au paradis, je répondrais moi aussi à l’appel, mais nous vivons au mieux au purgatoire ».
Nous savons où nous situer, à la frontière entre le désarroi et la dérision, dans une COURSE QUOTIDIENNE où
Sur la ligne de départ
Comme pour une course,
L’athlète au foyer compte mentalement
Les sauts d’obstacle.
Et si notre foi dans le présent n’a pas été tout à fait sauvegardée, on se range entre la solitude que l’on sait rendre librement nombreuse, le découragement et le rire mais jamais du côté de la résignation : La résignation est un suicide quotidien, lit-on dans l’exergue de l’opus, citation du romancier Balzac. La vie une comédie humaine, soit. Mais l’écriture recoud les déchirures. Comble chaque
LACUNE
Il me manque des pages au manuel de la vie,
entre autres celles concernant le logiciel
de compression des choses à faire.
Les rebonds sont au rendez-vous pour repartir de plus belle, avec un bouquin, un crayon, un cahier, même la figure copieusement aspergée par les phéromones d’un chat (p.11), et l’on parle de l’avenir, malgré tout :
NO FUTUR
Famille motoculteur et tronçonneuse se lancent à l’attaque
et vas-y que se lamentent les moutons en ces temps
foutuistes. Les nuages arrivent de partout, meutes aux
ventres sales. Souffle, fraîcheur, caresse et les antennes nous
grillent.
L’humour ici se pratique en solo, en famille, avec une « madeleine Thaï », dans une « minute zen », entouré pourquoi pas de chats, au pire de « gens qui vous quotidiennent le quotidien. / On appelle ça des cons » et même au sein du « purgatoire vert » autour de chez soi ; en prose, en distiques, en tercets, avec l’air quotidien d’un haïku ou l’air haïku du quotidien, tout dépend de l’humeur de chacun(e) – par exemple :
PANACHÉ ZEN
Il fait très beau, le ciel est très bleu, les oiseaux chantent très
bien. C’est le jour du premier passage du nuage nucléaire
japonais.
Humour en touches de petites vérités journalières assénées « on the road », en hamac (« machine à suspendre le temps »), à l’endroit, mieux, à l’envers sans manquer de diffuser pourquoi pas, par-ci par-là – voire en épilogue – comme une petite leçon de vie à celles et à ceux qui n’auraient pas encore compris à quoi elle tient : à presque rien. Un fil. Celui d’un micro-poème pourquoi pas. Un microcosme d’immanquable et féroce bêtise, un monde fait de beautés paradoxales ravissantes et/ou ravies. Le bonheur. Un bonheur immense dans notre décor minuscule.
TROP MINUSCULES
D’un beau vert pomme mais si minuscule, vraiment la moitié
d’un puceron, le voilà sur mon doigt. J’ai soufflé mais il est
resté là, alors je l’ai poussé un peu, et encore un peu et il a
fini par avoir l’air……. Mort. Alors je l’ai poussé pour de bon,
avec tout de même un genre de remords, et c’est alors que ça
m’est venu, je me suis dit que toutes les injustices de notre
condition humaine viennent peut-être de ça… Nous sommes
simplement trop minuscules !
Murielle Compère-Demarcy
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