Prochainement, Aphrodite !, Willa Cather
Prochainement, Aphrodite !, Ed. Ombres, mars 2018, trad. américain et présentation, Sylvie Rozenker, 94 pages, 9 €
Ecrivain(s): Willa Cather
C’est un tout petit livre – une longue nouvelle – qu’on peut avaler en une heure. Mais c’est l’heure délicieuse ! Willa Cather nous a habitués à ses portraits de femmes étincelants – Mon Antonia, mon ennemi mortel, Lucy Gayheart – et, derrière le sympathique Don Hedger, artiste peintre new-yorkais, c’est bien encore une femme exceptionnelle qui se dessine hautement. Eden Bower, artiste débutante, va débarquer dans la vie du très (trop ?) tranquille Don. Elle va occuper l’appartement mitoyen du sien et, peu à peu mais à coup sûr, occuper aussi l’esprit et le cœur du bonhomme. Du bonhomme et de son chien César, aussi « père peinard » que son maître.
Eden est une belle femme, blonde, grande, et qui se pose un peu là ! Une femme au caractère bien trempé, autoritaire, très sûre d’elle-même, ambitieuse, et voilà notre peintre bien empêtré dans une relation de flirt qui tourne à l’affaire amoureuse. Il subit – avec plaisir néanmoins – les diktats de son amoureuse, allant parfois jusqu’à laisser César à la maison quand ils sortent dîner en tête-à-tête. Impensable !
A travers les sentes de cette aventure sentimentale, c’est un vieux New York oublié – celui de la fin du XIXème siècle – plein de charme et de nostalgie, que Willa Cather nous fait visiter. Le Brevoort – grand hôtel de luxe à la façade rutilante et aux salons baroques – existait encore. Des spectacles de ballons dirigeables ont alors lieu à Coney Island – Eden en profitera pour s’illustrer de façon étonnante – et les transports urbains sont encore ceux de l’avant-métro (la première ligne s’ouvrira en 1904).
« À cette époque, les voyageurs de Long Island arrivaient à New York en ferry. Hedger dut se hâter de sortir son chien du wagon pour pouvoir attraper le premier bateau. L’East River, les ponts, toute la ville jusqu’à l’ouest brûlaient de l’incendie du soleil couchant. On sentait dans l’atmosphère le soir étendre ses ailes sur ceux qui rentraient chez eux.
Une fois à la 34ème rue, il fallait emprunter trop de correspondances compliquées ; pour la première fois de sa vie, Hedger prit un fiacre jusqu’à Washington Square. César s’installa droit comme un piquet à ses côtes, sur le coussin de cuir usé, et ils partirent en cahotant, dominant le reste du monde ».
Et puis un soir, Don Hedger raconte un étrange et cruel conte aztèque à Eden. Moment des plus bizarres, des plus insondables. Et les choses se compliquent entre eux, les liens se dénouent curieusement. Willa Cather (parfaitement traduite par Sylvie Rozenker) nimbe son petit roman de nostalgie et de poésie.
Une heure délicieuse, disions-nous.
Léon-Marc Levy
VL3
NB : Vous verrez souvent apparaître une cotation de Valeur Littéraire des livres critiqués. Il ne s’agit en aucun cas d’une notation de qualité ou d’intérêt du livre mais de l’évaluation de sa position au regard de l’histoire de la littérature.
Cette cotation est attribuée par le rédacteur / la rédactrice de la critique ou par le comité de rédaction.
Notre cotation :
VL1 : faible Valeur Littéraire
VL2 : modeste VL
VL3 : assez haute VL
VL4 : haute VL
VL5 : très haute VL
VL6 : Classiques éternels (anciens ou actuels)
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