Poèmes, par Charles Bruno Orlac
Partout du feu
C’est partout du feu
Folie
Un jeu
Qui a pour nom
Barbarie
Il pleut
Sur l’enfant mort
Il pleut
Des pluies
Corbeaux
Pluies
D’acier d’acide
Il pleut
Sur des vies
Impunément
Raccourcies
Obus
Ovale
Visages
En débris
Braise et métal
C’est partout du feu
Du feu partout
Qui tombe en pluie
Et sur le sol
Sans abris
Ni linceuls
Partout
Des corps
Des bris
D’humains
Tombés pour rien –
Ternes tessons
De soleils morts
*
Sous la brume
Un océan de brume sur la ville
Depuis Montmartre je devine
Effleurant la surface
Quelques toits engloutis
Quelques feux
Tamisés
Des rires d’épaves
D’une cave à rêves, les amphores
Intactes
Des jeux de mains qui se cherchent
Des paris perdus
Pourquoi tant d’écueils ?
Au-dessus de la brume
aurait-il si peu d’effet le
Phare allumé de la Tour !
*
Vieille dame
Elle dormait là presque nue, âgée,
sous un ciel nuageux,
et les passants qui passaient le savaient :
ils ne pourraient rien
contre l’orage qui bientôt
allait éclater.
*
Lamento
J’ai des chaussures
Tu as des pieds
Oui mais aux pieds
Pas de chaussures
J’ai des chaussures
Mais plus de pieds
Un éclat d’obus
M’a mutilé
J’ai des chaussures
Mais à la main –
C’est pour tes pieds
Qui en ont besoin
Toi qui t’exiles
Toi qui dois fuir
Pauvre civil
Ce long martyre
Toi qui dois fuir
Leur guerre à eux
Ceux qui t’ont mis
Entre deux feux
Raisons d’état
Rebelles et fous
Toi qui dois fuir
Nos guerres à nous
Pauvres soldats
J’ai des chaussures
Tu as des pieds
Va-t-en prends-les
La route est dure
Avec ou sans
Quitte la ville
Quitte ces ruines
Avec ou sans
La route est longue
Pour toi migrant
Charles Bruno Orlac
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