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Naguib Mahfouz poursuivi dans sa tombe !

Ecrit par Amin Zaoui le 26.12.11 dans Chroniques régulières, La Une CED, Les Chroniques

"Souffles" in "Liberté"

Naguib Mahfouz poursuivi dans sa tombe !

 

“Lorsque la politique tombe, le régime chute. Mais lorsque la culture s’effondre, c’est tout le pays qui s’écroule”

Kassem Hawal.


Même si (houb) amour est le mot le plus répété, le plus défendu, le plus célébré dans les écrits romanesques et narratifs de Naguib Mahfouz, même si l’écrivain est entre de bonnes mains, celles du Bon Dieu, les salafistes eux n’ont pas pardonné au romancier. En ces jours où ils refont surface en égypte, et à l’occasion de son centenaire, Naguib Mahfouz est poursuivi jusque dans sa tombe. Inquiété dans sa quiétude éternelle !

En 1959, cheikh Mohamed Al Ghazali, alors fonctionnaire au ministère égyptien des Habous et des affaires islamiques chargé du dossier de la censure littéraire et artistique, a adressé un brûlant rapport sous forme d’une fatwa au président, le Raïs Nasser, lui demandant  l’interdiction de toute publication du roman « Awlad Haretna » (Les enfants de Médine) de Naguib Mahfouz. Depuis, le roman demeure, officiellement, interdit de publication dans son pays. Et le romancier menacé dans sa vie personnelle jusqu’à sa mort le 30 août 2006.

Le 13 octobre 1988, le prix Nobel de littérature est décerné à Naguib Mahfouz. Il fut  le premier et l’unique écrivain arabe et maghrébin, jusqu’à nos jours, qui a été décoré par cette prestigieuse distinction littéraire. Les salafistes s’acharnent contre lui. Redoublent de férocité.

Le 14 octobre 1994, un demi-siècle après la date de la fatwa promulguée par cheikh Al-Ghazali à l’encontre du roman Les enfants de Médine de Naguib Mahfouz, en pleine rue du Caire, ville que l’écrivain n’a jamais quittée, deux jeunes fanatiques islamistes ont tenté de l’assassiner. Le romancier le plus populaire, le plus célèbre, dans le monde arabe est attaqué par les enfants de Médine. Miraculeusement, il survit à cette tentative d’assassinat à l’arme blanche.

Il perd une partie de sa capacité physique. La main qui jadis maniait l’arme magique du roman s’est trouvée sans mouvement, handicapée. Il passa de l’écrit à la dictée. Le 30 août 2006, Naguib Mahfoud est décédé. Le jour de son enterrement, toujours, sous l’influence de la fatwa décrétée par cheikh Mohamed Al Ghazali à l’encontre de l’écrivain, des groupes de jeunes fanatiques ont branlé des slogans : “Qu'il aille en enfer, et nous prions Dieu de lui donner la punition maximale”.

La malédiction !

Le 11 décembre 2011, l’Égypte littéraire se prépare pour célébrer le centenaire de Naguib Mahfouz, l’enfant du Caire. Le pays est en pleine campagne électorale, les salafistes égyptiens, demandent l’annulation pure et simple de toutes les activités culturelles ou littéraires célébrant le centenaire de Naguib Mahfouz ! Ils font de cette interdiction leur “projet de société de demain !!”. Un fonds de commerce politico-religieux. Ainsi Naguib Mahfouz, l’écrivain le plus célèbre des Arabes, est poursuivi jusque dans sa tombe, jusque dans sa mort. Inquiété dans sa quiétude éternelle. Deux phénomènes sont la cible capitale, l’ennemi farouche des salafistes : la création et la femme.


Amin Zaoui


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A propos du rédacteur

Amin Zaoui

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Rédacteur


Amin Zaoui est un écrivain algérien né le 25 novembre 1956 à Bab el Assa (Algérie). il écrit chaque jeudi deux articles un en arabe dans le quotidien arabophone echorouk et en français dans le quotidien francophone liberté.

 

 

 

1984-1995 : enseignant à l’université d'Oran (département des langues étrangères)

1988 : Doctorat d'État en littératures maghrébines comparées

1991-1994 : directeur général du Palais des Arts et de la Culture d’Oran

2000-2002 : enseignant à l’université d’Oran (département de la traduction)

2002-2008 : directeur général de la Bibliothèque nationale d'Algérie

2009 : membre du conseil de direction du Fonds arabe pour la culture et les arts (AFAC)

Conférencier auprès de plusieurs universités : Tunis, Jordanie, France, Grande-Bretagne.

 

Publications en français

Les romans d’Amin Zaoui ont été traduits dans une douzaine de langues : anglais, espagnol, italien, tchèque, serbe, chinois, persan, turque, arabe, suédois, grec…

 

Sommeil du mimosa suivi de Sonate des loups (roman), éditions le Serpent à plumes, Paris, 1997

Fatwa pour Schéhérazade et autres récits de la censure ordinaire (essai collectif), éditions L'Art des livres, Jean-Pierre Huguet éditeur, 1997

La Soumission (roman), édition le Serpent à Plumes, Paris, 1998 ; 2e édition Marsa, Alger. Prix Fnac Attention talent + Prix des lycéens France

La Razzia (roman), éditions le Serpent à Plumes, Paris, 1999

Histoire de lecture (essai collectif), éditions Ministère de la Culture, Paris, 1999

L’Empire de la peur (essai), éditions Jean-Pierre Huguet, 2000

Haras de femmes (roman), éditions le Serpent à Plumes, 2001

Les Gens du parfum (roman), éditions le Serpent à Plumes, Paris, 2003

La Culture du sang (essai), éditions le Serpent à Plumes, Paris, 2003

Festin de mensonges (roman), éditions Fayard, Paris, 2007

La Chambre de la vierge impure (roman), éditions Fayard, Paris, 2009

Irruption d’une chair dormante (nouvelle), éditions El Beyt, Alger, 2009

 

En arabe

 

Le Hennissement du corps (roman), éditions Al Wathba, 1985

Introduction théorique à l’histoire de la culture et des intellectuels au Maghreb, éditions OPU, 1994

Le Frisson (roman), éditions Kounouz Adabiya, Beyrouth, 1999

L'Odeur de la femelle (roman), éditions Dar Kanaân, 2002

Se réveille la soie (roman), éditions Dar-El-Gharb, Alger, 2002

Le Retour de l'intelligentsia, éditions Naya Damas, Syrie, 2007

Le Huitième Ciel (roman), éditions Madbouli, Égypte, 2008

La Voie de Satan (roman), éditions Dar Arabiyya Lil Ouloume, Beyrouth ; éditions El Ikhtilaf, Alger, 2009

L'Intellectuel maghrébin : pouvoir - femme et l’autre, éditions Radjai, Alger, 2009