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Mangoustan, Rocco Giudice (par Christelle D'Hérart-Brocard)

11.10.19 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Allary Editions, Roman

Mangoustan, Rocco Giudice, août 2019, 240 pages, 17,90 €

Edition: Allary Editions

Mangoustan, Rocco Giudice (par Christelle D'Hérart-Brocard)

 

 

Voici un roman qui laisse dubitatif parce qu’il est à la fois très convenu et étonnant par certains aspects. Il y est question de trois femmes, trois vies domestiques très différentes, trois destins parallèles qui bifurquent et se croisent fortuitement à Hong Kong, alors que l’île va à être balayée par un typhon du nom de « Mangoustan ». La structure narrative est sans surprise : une alternance de chapitres courts développant la vie de chacune des trois héroïnes. L’écriture n’est pas désagréable : une facture simple, un rythme alerte et volontairement désinvolte, puisque de nombreux dialogues, calqués sur la vie quotidienne, ponctuent une narration extradiégétique. On devine assez vite que les trois personnages principaux représentent des archétypes féminins assujettis à leurs relations conjugales. Le combat pour l’émancipation ne tarde pas à pointer son nez.

L’auteur aurait pu en rester là et se fourvoyer dans une espèce de célébration déguisée de la cause féministe. Mais il n’en est rien : les prises de positions attendues se trouvent judicieusement évincées au profit d’une énonciation factuelle uniquement jaugée à l’aune de trois consciences qui, bien que fragilisées et tourmentées, s’avèrent perspicaces et responsables. Si les femmes sont en souffrance, elles le sont certes par amour (ce qui est tout à leur honneur), mais aussi par imprudence, par orgueil et ambition démesurés. Aussi, chacune d’entre elles, après avoir tiré le constat d’un échec, d’une fêlure ou d’une impasse dans sa vie conjugale, s’engage courageusement sur le chemin de la reconstruction personnelle ou de la préservation de son couple. Le lecteur peut donc se rassurer : la femme n’est donc pas (qu’)une Baby doll écervelée tombée entre les mains capricieuses d’un goujat impénitent. Et pour renforcer ce dernier point, on notera la présence, parmi les trois héroïnes, de Melania Trump qui, dans son rôle de First Lady contre son gré, donne une tournure drolatique et burlesque à un récit somme toute dramatique. Son personnage ultra contemporain, puisqu’elle tweete à tout va, aurait pu rester grotesque si l’auteur n’avait associé à l’image patentée de la Lady bimbo une posture originale et pertinente à l’égard du président américain. Ce dernier, peu mis en valeur, reste néanmoins digne d’être aimé par Melania… CQFD ? Finalement, un premier roman prometteur dont l’appréciable légèreté déjoue les pièges d’une thématique romanesque surexploitée.

 

Christelle d’Hérart-Brocard

 

Rocco Giudice, né en 1982, d’un père italien et d’une mère espagnole, vit entre Hong Kong et Genève. Mangoustan est son premier roman.

 

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