Ma famille de cœur, Carole Weisweiller
Ma famille de cœur, éd. Michel de Maule, novembre 2016, 112 pages, 17 €
Ecrivain(s): Carole Weisweiller
La « famille » de Carole Weisweiller, fille de cœur de Jean Cocteau.
Le livre de Carole Weisweiller est, sur l’amitié, un modèle du genre. Il réjouira les plus anciens des lecteurs qui ont connu, du moins de noms, sa « famille de cœur », et ouvrira aux plus jeunes des horizons nouveaux sur le XX° siècle.
La vente de la Villa Santo-Sospir aux fresques peintes par Jean Cocteau a probablement amené Carole, sa propriétaire, qui « fermait un chapitre important de (sa) vie » à faire le récit des amitiés qui l’ont marquée après la mort du Poète.
C’est bien sûr Jean Marais, le bien-aimé de toute une génération d’adultes et d’enfants, son « grand frère » – son dernier lien avec Cocteau – qui est à l’honneur du premier chapitre. Jusqu’au cimetière de Vallauris où celui-ci repose et où elle lui a dit adieu, Carole raconte les spectacles, les fêtes, les émissions, tout ce qui a pu approfondir leur amitié.
Le second chapitre est consacré à l’amitié qu’elle a entretenue avec Jean-Claude Brialy. Elle évoque, là aussi, dans une superbe lettre écrite à sa mort, ce grand artiste comme « le frère de cœur » choisi après Jean Marais.
A la suite de ces deux grandes figures, d’autres portraits comme celui de Nana Mouskouri, devenue son amie grâce à Jean-Claude Brialy, font la joie du lecteur. Comme celui également de Raymond Gérôme. Initiée au théâtre par le Poète, Carole sera l’assistante du metteur en scène.
La précision, alliée à l’humour, des anecdotes, enchante également le lecteur qui n’en est qu’à ses premières découvertes. En digne fille de cœur de Jean Cocteau, Carole entre dans un univers à la fois de travail et de rêve. Jusqu’à, un jour, être, par exemple, la souffleuse de Paul Meurice mourant de trac ! Un univers qui lui offre de magnifiques amitiés : celle de Ninon Tallon Karlweis, amie de Jean Giraudoux et ouverte à la spiritualité, ou celle de Herbert Von Karajan grâce auquel elle a ressenti ses premières émotions musicales.
Le charme du livre, il faut l’ajouter, repose sur un récit chronologique des faits et des rencontres. Ainsi Carole, fascinée par l’œuvre de son ami le metteur en scène anglais Peter Brook, devient-elle, à l’aube de 1968, productrice de films. Puis, dans un tout autre domaine, vient le récit de son expérience spirituelle près de Pondichéry et celle, encore, de sa vie dans un Kibboutz.
La dernière partie du livre est une suite de portraits d’artistes prestigieux eux aussi, comme celui de la décoratrice Madeleine Castaing, du danseur Jacques Chazot, ou de l’immense Picasso lui-même, dont le lecteur, toujours émerveillé, découvrira des pans de vie.
Le récit de Carole se clôt sur ses amitiés avec les grands couturiers – de Yves Saint-Laurent, Mademoiselle Chanel à Pierre Cardin, ils ont habillé sa mère Francine – ces artistes qu’elle admire et qui montrent aux lecteurs, sous sa plus belle lumière, le XX° siècle et l’orée du suivant. Ceux-ci achèvent leur lecture, rassasiés de connaissances et de beautés diverses.
Pour finir, Carole éprouve le besoin d’évoquer son amour pour son fils adopté tardivement au Mexique et, paradoxalement, ses réflexions sur la solitude.
France Burghelle Rey
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