Le Trou de ver, Patrick Devaux (par Parme Ceriset)
Le Trou de ver, Patrick Devaux, éditions Le Coudrier, février 2023, Ill. Catherine Berael, 60 pages, 16 €
Edition: Le Coudrier
Se pourrait-il que la poésie soit créatrice d’un lien imperceptible entre les vivants et les morts, un « trou de ver » qui relierait deux régions distinctes de l’espace-temps, comme il en existe en astrophysique ?
Se pourrait-il qu’une « main blanche », celle d’un ange, revienne de l’après-vie et tende au poète un poème ultime, celui qui n’a encore jamais été écrit ?
Tout est possible dans l’univers de l’imaginaire, de l’art, et les métaphores de Patrick Devaux savent ressusciter les absents, immortaliser leurs parfums, la trace de leur passage. Bien sûr, chacun peut y croire ou non, car « les témoins se font rares », et « il reste si peu de nous », parfois un simple geste furtif « dans la mémoire d’un rétroviseur », à l’instant d’un drame irréparable, inoubliable, que personne n’a vu venir :
« Tapis dans l’ombre, le destin fouillait le cri des buissons ».
« Je n’entendais pourtant rien d’autre / qu’un poème récité / sans danger précis ».
La poésie, dans sa dimension curatrice, aide aussi à disséquer l’incompréhensible, l’inacceptable, l’horreur qui sans prévenir surgit dans une existence comme un coup de tonnerre dans un ciel serein.
Il y a en effet après l’épreuve, cette conviction que rien ne sera jamais comme avant :
« Soudain le regard de la louve a changé », soudain « l’adieu d’une fenêtre à peine ouverte »…
« Les phares ronds ont sursauté »…
« La radio jouait What a beautiful word » (…) « Quand la louve s’est retournée / c’est la dernière fois / que je vis sa lèvre trembler ».
Comment alors « sortir du trou noir », après ça ?
Même l’écriture semble parfois impuissante :
« mettre des mots à tout n’a pas mieux fait voler l’insecte / tu ne viendras plus / ses ailes brisées me l’ont dit ».
Mais le « trou de ver » n’aurait-il pas gardé en lui de quoi recréer le lien ?
« Après tant d’années / de l’autre côté des phrases / le trou de ver a pris le temps / d’écrire quelques mots blancs ».
Ainsi va la vie et la magie de la poésie qui nous sauve de bien des tempêtes, comme en témoigne la plume talentueuse de Patrick Devaux.
Un recueil bouleversant de vie et d’humanité.
Parme Ceriset
Patrick Devaux est né en Belgique sur la frontière avec la France, habite Rixensart, auteur d’une trentaine d’ouvrages auprès d’éditeurs divers en poésie, quelques prix d’édition, 3 romans parus dont 2 aux éditions Les Carnets du Dessert de Lune ; 2 recueils de poésie récents (2016 et 2017) parus aux éditions Le Coudrier ; membre de l’AEB (Association des Ecrivains Belges) et de l’AREAW (Association Royale des Ecrivains et Artistes de Wallonie), il a aussi de nombreux contacts en France ; il fréquente de près ou de loin les écrivains du groupe de l’Ecritoire d’Estieugues de Cours la Ville et de l’Association LITTERALES de Brest ; publie aussi dans diverses revues de poésie. Fréquente aussi les réseaux sociaux, faisant ainsi connaître la poésie d’auteurs moins connus ou disparus.
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