Le Complexe d’Eden Bellwether, Benjamin Wood (par Jean-Jacques Bretou)
Le Complexe d’Eden Bellwether, juin 2020, trad. Renaud Morin, 522 pages, 9,95 €
Ecrivain(s): Benjamin Wood Edition: Zulma
Oscar Lowe est aide-soignant à la maison de retraite Cedarbrook à Cambridge. Un soir d’octobre 2002, il rentre chez lui, à pied, après une journée de travail. Il passe devant la chapelle de King’s College et son attention est retenue par la musique puissante de l’orgue s’échappant par les portes ouvertes de la chapelle. Il pénètre dans l’église pour écouter la fin de l’office et la musique. En sortant, il fait la connaissance d’Iris Bellwether et de son frère Eden. Ces derniers étudient à Cambridge et exceptionnellement sont autorisés à loger chez leurs parents, bienfaiteurs de l’université, qui résident dans la ville de la Cam et des colleges. Une conversation a lieu entre les trois personnages. Les deux étudiants sont heureux de rencontrer quelqu’un d’« ordinaire » travaillant à la maison des glycines et Oscar apprend qu’Eden était derrière l’orgue d’où s’échappait cette musique si remarquable. C’est le début d’une « Love story » à la façon d’Erich Segal et d’un terrible thriller.
Elle était belle, il était beau, elle était riche, il était pauvre mais ils étaient très intelligents tous les deux, ils se rencontrèrent dans cet endroit extraordinaire et élitiste qu’est Cambridge. Alors que l’on pensait en avoir fini avec les bluettes romantiques, on se laisse aisément transporter par cette histoire si romanesque. Certainement tous les ingrédients du genre ou presque sont présents, mais l’on ressent, de plus, un peu manipulé sans doute, l’envie de succomber au charme de cette romance comme on accepte de s’autoriser à goûter de nouveau à ces friandises qui nous faisaient fondre lorsqu’on était gamin(e)s. Le style si maîtrisé de Wood fait le reste.
La bluette entamée, on se sent glisser vers quelque chose de plus étrange, d’un peu flou. Oscar franchit aisément les obstacles, il commence par convaincre les trois amis, Yin, Marcus et Jane, des Bellwether, par son comportement et son intelligence, de l’accepter au sein de leur petit groupe si fermé. Puis, honneur suprême, il fait la connaissance des parents qui l’accueillent volontiers. Mais le frère comme souvent dans ce genre d’histoire pourrait peut-être avoir revêtu les habits du chaperon ? En tout cas, Oscar parle-t-il d’un de ses pensionnaires, le Dr Abraham Paulsen, ou de son ami Crest, Eden fait en sorte d’occuper en permanence le devant de la scène en pérorant sur un de ses sujets de prédilection, la musique bien sûr, la thérapie musicale et les écrits controversés de Johann Mattheson, compositeur et théoricien allemand du XVIIIe siècle. Et puis, tout va se précipiter, cette histoire va changer de rythme, devenir palpitante, haletante.
C’est un beau travail d’écriture servi par une excellente traduction.
Jean-Jacques Bretou
Benjamin Wood, né en 1981, a grandi dans le nord-est de l’Angleterre. Amplement salué par la critique, Le Complexe d’Eden Bellwether, son premier livre, a reçu le prix du roman FNAC.
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