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Le Beau, l’Art Brut et le Marchand – Jean-Pierre Ritsch-Fisch, Laurent Fassin (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché 15.12.22 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, L'Atelier Contemporain, Roman

Le Beau, l’Art Brut et le Marchand – Jean-Pierre Ritsch-Fisch, Laurent Fassin 368 p. – 25 euros – 21-10-2022

Edition: L'Atelier Contemporain

Le Beau, l’Art Brut et le Marchand – Jean-Pierre Ritsch-Fisch, Laurent Fassin (par Philippe Chauché)

 

« Les découvertes dont il avait soif et qu’il faisait à rythme régulier aiguisaient sa sensibilité. Elles l’orientaient – comment ne pas le voir ? – dans une direction inconnue, sans qu’il sût bien apprécier les sinuosités, la part d’ombre, les obstacles qui inévitablement jalonnent tel qui caresse le projet de s’y engager plus avant. »

« Une destinée ne se forge que rarement dans une complète solitude. D’autres que soi jouent un rôle déterminant dans son affirmation et son tracé, qui autorise son accomplissement. »

Le Beau, l’Art Brut et le Marchand est un passionnant roman d’aventure artistique et familiale, celui de Jean-Pierre Ritsch-Fisch, collectionneur, marchand d’art et galeriste. Ce livre est aussi, et le pari était plus hardi, le roman de l’aventure de l’art vivant, de la Figuration narrative à l’Art Brut, d’artistes, de marchands, d’amateurs rigoureux que Le Passeur du Jamais-vu, croisera dans son parcours en haute mer créatrice.

Enfant, il se plonge avec délectation dans les livres de son grand-père maternel d’origine uruguayenne. Puis il ressent son premier choc esthétique face à l’exposition Toutânkhamon au Petit-Palais à Paris, un choc et une forte émotion qui seront tout au long de sa carrière ses deux critères pour choisir une œuvre qui rejoindra sa galerie. Le jeune garçon se passionnera pour les romans d’aventure, sans se douter qu’il écrivait la première page de son propre roman d’aventure. Il doit beaucoup à son professeur de français et philosophie, il fait découvrir au futur galeriste sa bibliothèque, ses dessins et ses peintures : Vieira da Silva, Léon Zack, Tal Coat, Picasso, un passeur s’adressait à ses élèves dont certains, le deviendraient peut-être à leur tour : « Je vais vous apprendre, vous apprendre à voir. ».  Voilà qui n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd, mais dans celle d’un futur galeriste à l’oreille fine, et à l’œil affuté. Cette oreille et cet œil, qui rencontrèrent Léon Zack, c’est chez lui, qu’il acheta sa première œuvre, une fenêtre s’ouvrait, et elle ne refermerait jamais.

« Parvenir à ses fins nécessiterait un peu de malice et une vraie capacité de conviction auprès de ses interlocuteurs, mais supposait avant tout de sa part la mise en pratique d’une règle à laquelle il ne pourrait plus être question de déroger ; c’est tout à fait intuitivement, en vrai autodidacte, qu’il en formula les termes, pressé d’appliquer sa méthode mot pour mot, sans nécessité par conséquent de la peaufiner davantage. »

Il misera donc sur son seul point de vue, et sur aucun compromis. Les artistes lui ouvriront leurs ateliers, comme l’entreprise familiale de fourrure s’ouvrira aussi à lui, il conjuguera un temps sa raison et sa passion, ce que traduit remarquablement Laurent Fassin. Les œuvres vont donc circuler comme les mots d’aventuriers de l’enfance. Des artistes et des collectionneurs vont éclairer la vie aventurière de Jean-Pierre Ritsch-Fisch, mais ne dévoilons pas tout, conservons pour mieux comprendre ce formidable parcours de découvreur les noms de : Jacques Monory, Gérard Gasiorowski, Claude Viallat, Louis Chacallis, Daniel Cordier l’orpailleur de l’art, et tant d’autres, que l’ouvrage met merveilleusement en lumière dans son cahier central, foisonnant de reproductions d’œuvres maîtresse de notre collectionneur avisé. La force, la grande force du livre de Laurent Fassin par son style ample, précis, rigoureux, et inspiré, c’est de nous plonger dans l’art des années 70 à nos jours, de nous conduire fidèlement à la rencontre des artistes que le collectionneur rencontra. On s’installe dans leurs ateliers en toute discrétion, on écoute les échanges qu’ils ont avec Le Passeur du Jamais-vu, on apprend à écouter et à voir. C’est ainsi que Laurent Fassin fait aussi œuvre d’historien de l’art d’aujourd’hui. Ce nouveau livre de L’Atelier contemporain, porte plus que jamais son nom, un atelier vivant et vivifiant face à un galeriste lumineux et curieux.

 

Philippe Chauché

 

Laurent Fassin est écrivain et peintre, on lui doit notamment À l’orée de forêts profondes – préface de Lionel Bourg – photographies de Serge Lapaz – (Le Temps qu’il fait), La Maison l’île – recueil de poèmes rehaussés d’encres de Chine d’Elisabeth Macé – (Editions Conférence). Il collabore également à La Cause Littéraire.

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A propos du rédacteur

Philippe Chauché

 

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Rédacteur

Domaines de prédilection : littérature française, espagnole, du Liban et d'Israël

Genres : romans, romans noirs, cahiers dessinés, revues littéraires, essais

Maisons d’édition les plus fréquentes : Gallimard, Minuit, Seuil, Grasset, Louise Bottu, Quidam, L'Atelier contemporain, Tinbad, Rivages

 

Philippe Chauché est né en Gascogne, il vit et écrit à St-Saturnin-les-Avignon. Journaliste à Radio France durant 32 ans. Il a collaboré à « Pourquoi ils vont voir des corridas » (Editions Atlantica), et récemment " En avant la chronique " (Editions Louise Bottu) reprenant des chroniques parues dans La Cause Littéraire.

Il publie également quelques petites choses sur son blog : http://chauchecrit.blogspot.com