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La vie est un vaste jardin de roses, par Nadia Agsous

Ecrit par Nadia Agsous 13.03.18 dans Nouvelles, La Une CED, Ecriture

La vie est un vaste jardin de roses, par Nadia Agsous

 

– Hé Ô, faut pas avoir peur ! souffla-t-elle dans le creux de mes oreilles pendant que je dormais à poings fermés, après une journée de dur labeur.

L’aube des jours heureux fait son entrée dans la légende primitive. Pendant ce temps, je m’agrippe au sommeil qui m’entraîne jusqu’aux confins de mes origines lointaines. Je dors profondément !

Le tumulte des mots susurrés par la quiétude aurorale qui tremble de tendresse, à l’aube de la brume fuyante, a cessé, tandis que la vie continue à moissonner la terre belle et généreuse.

Là-bas, loin de nos aveuglements, des êtres de chair, des hommes, des femmes et des enfants, esseulés, les corps enveloppés dans le coffin de l’au-delà, offrent leur âme en libation. Au seuil de l’éternité or-rougeoyante, une salve de rires déchire la terre d’un mouvement hystérique. Etonnement rédempteur !

Au détour de la rue des Emotions, non loin du Passage des Sentiments Nus, des illusions errent dans les entrailles de la Conscience du Monde. La Vie prend la forme d’un long chemin menant vers une vaste farandole de couleurs joyeuses. Une caresse bienfaisante de bien-être berce la promesse d’une existence habillée d’un bonheur qui hulule de joie. La vie est belle !

Au cœur de cette atmosphère bouillonnante de vie et de beauté terrestre et cosmique, la voix stridente du muezzin qui appelle à la prière de l’Aube sonne comme un rappel à l’ordre. La vie serait-elle un défi en sursis ?

– As salat khayroun mina nawm (La prière est meilleur que le sommeil), braille-t-il dans le micro.

– As salat khayroun mina nawm, crie-t-il encore et encore !

Il est temps de se lever ; pourtant, je dors encore !

Dehors, il tombe de la barbe de crapaud. La pluie diluvienne a inondé mes rêves qui sanglotent de regrets habillés de nostalgie. Amère !

Tandis que les bras de Morphée recueillent des bribes de délires qui s’échappent de mon sommeil, la voix de la quiétude aurorale reprend le cours de son récit :

– Détourne ton regard de ces êtres noirs de cendres ! Laisse-les s’enrouler dans l’œuf déchu du Paradis Perdu ! Sois rassuré, personne ne te nuira ! Les forces du mal ont été expulsées de la terre, hier, à la tombée de la nuit, alors que le monde était plongé dans une inquiétude folle qui anesthésia plus d’un.

Enfant du désir et du souffle auroral, dès à présent, déploie les ailes de ta joie car rien mais alors rien ne pourra tarriver ! Le poids des serments millénaires pèse ! Vava Inouva, le géant de la Montagnesacrée veille sur toi. Dès laube des origines, tes ancêtres l’ont chargé de marcher sur ton lit de rêves,chaque matin, dès lapparition des premiers éclats de lumière. Accompagnée de la fée Kloufette, sa fille Aïcha, la reine des horizons bleutés, parsème le tapis de ton long périple sur terre, de pierres magiques,belles et odorantes de vie.

Fils de lAube habillée dor et lumière, lorsque tu te réveilleras chaque matin, n’oublie pas de pleurer.Verse vingt-sept larmes, histoire d’exorciser les démons qui agitent le spectre de la Catastrophe. Al’heure la lumière poindra, fais couler quatorze larmes en or sur ta joue droite. Puis vingt-quatreminutes après que lobscurité aura disparu de lhorizon blanchâtre, des mains nobles et généreusesdéposeront treize larmes en diamant sur ta joue gauche. Riche et comblé, tu retourneras la terre de tes mains nobles et généreuses.

Enfant béni, sois discret ! Pleure dans l’ombre de ton ombre ! Personne ne doit te voir ! Nul ne doit te surprendre dans les moments de ton extrême fragilité ! Aucun être humain ne doit découvrir ta vulnérabilité. Sois secret ! Cache tes sentiments ! Enfouis tes larmes dans le creux du silence ! Personnene doit entendre tes sanglots qui sonnent comme le glas de lamertume et de limpuissance ! Dès que lejour aura triomphé sur lobscurité rampante, cache-toi ! Pleure ! Sèche tes larmes ! Et oublie que tu aspleuré ! Les voleurs de larmes d’enfants guettent depuis la nuit des temps ! Ce liquide lacrymal, au goûtâpre et salé a, semble-t-il, des pouvoirs de soulagement et de guérison.

Enfant de la fougue pétillante, faut pas avoir peur ! Tu n’es pas seul au milieu des loups qui rôdent ! Surles routes cendreuses, nous irons défier les forces ténébreuses ! Sous un soleil blanc-neige, noussuivrons les traces de la fée du Hasard qui nous mèneront est dissimulé le Talisman desMerveilles, cette relique ancestrale, brodée de fils dor venus de Damas, de Constantinople, de Grenade,de Bougie et de Constantine. Enfant de la splendeur matinale, nous marcherons, ensemble ! Main dansla main, nous obombrerons le voile qui obstrue ta vue !

Nous irons mettre à nu les existences écorchées. Dans la nuit douce du printemps naissant, nousentonnerons le chant des Quatre Saisons et, nous irons vêtir la Rose du Petit Prince de son souriresubliminal. Nous allumerons le feu de nos déchirures, et nous nous engouffrerons dans la lumière iriséedes flammes de la purification. Au crépuscule, nous marcherons sur le côté lumineux de l’existence ;éblouis par la lumière phosphorescente de la fleur dargent, nous explorerons le chemin radieux, là où laRévélation fut !

Aussi longtemps que tu vivras, tu te souviendras de ce rêve qui déambulera en toute liberté dans les ruelles de ton existence belle et rebelle.

Je te le promets !

 

Nadia Agsous

 


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Rédactrice


Journaliste, chroniqueuse littéraire dans la presse écrite et la presse numérique. Elle a publié avec Hamsi Boubekeur Réminiscences, Éditions La Marsa, 2012, 100 p. Auteure de "Des Hommes et leurs Mondes", entretiens avec Smaïn Laacher, sociologue, Editions Dalimen, octobre 2014, 200 p.

"L'ombre d'un doute" , Editions Frantz Fanon, Algérie, Décembre 2020.