La Pierre du remords, Arnaldur Indridason (par Jean-Jacques Bretou)
La Pierre du remords, février 2021, trad. islandais, Éric Boury, 320 pages, 21,50 €
Ecrivain(s): Arnaldur Indridason Edition: Métailié
Marta, cheffe de la police, est appelée sur une scène de crime. Sur place, elle découvre, allongée derrière la porte d’entrée, dans son appartement mis sens dessus dessous, une septuagénaire qui d’après les dires du légiste aurait été étranglée et étouffée avec un sac en plastique. Elle appelle Konrad, un ex-collègue dont la carte de visite est en vue, posée sur un meuble. Ce dernier vient retrouver Marta qui le questionne au sujet de cette carte. Après un moment d’hésitation, il se souvient que cette femme, Valborg, sachant qu’il avait travaillé dans la police, avait fait appel à lui il y a quelque temps pour retrouver un fils qu’elle aurait eu quarante-sept ans plus tôt suite à un viol. Konrad aurait à cette époque décliné cette proposition de travail. Aujourd’hui, cette femme retrouvée morte, il éprouve du remords, il pense qu’elle partageait le même sentiment, et se sent très concerné par la disparition de l’enfant.
En guise de réparation, il va donc partir à la recherche de ce dernier. Et va croiser sur son chemin le fantôme de son père et de ses complices, escrocs dans l’âme, qui exploitaient la souffrance et les croyances des gens en se faisant passer lui et ses acolytes comme des spirites afin de les détrousser. Il va tenter de continuer la mission qu’il s’est donné d’élucider la mort de ce père retrouvé assassiné lardé de coups de couteau.
C’est donc un polar à double entrée, deux problèmes que le héros doit tenter de résoudre. Le poids de deux corps à porter sur son dos tant que les énigmes ne sont pas résolues. Est-ce là le prix d’une rédemption ? Est-ce un roman christique ? Le héros a-t-il quelque chose à se faire pardonner ? Indridason n’y répond pas. La mort est partout dans ce livre silencieux comme elle l’est sur sa couverture où figure un cimetière tout revêtu de neige. La vie aussi est là à travers les sculptures d’Asmundur Sveison et des sculptures de maternité. Est-ce soi-même ou ceux avec lesquels on tente de communiquer dans l’au-delà qu’il faut réparer ? Faut-il réparer les morts en élucidant des vérités (comme Maylis de Kerangal se propose de « réparer les vivants »). Il semblerait que morts et vivants ne trouvent la paix que toutes choses résolues, toutes choses à leur place.
C’est un livre passionnant fait de la douleur et de la peine des gens mais dont le moteur est le remords. Il s’inscrit dans la lignée des autres livres d’Indridason dont le héros est Erlendur Sveinsson. L’écriture claire, faite de courts chapitres se lit bien.
Les questions que se pose l’auteur avec l’âge sont peut-être plus graves mais restent universelles.
Jean-Jacques Bretou
Arnaldur Indridason est né à Reykjavik en 1961. Historien de formation, d’abord journaliste et critique de cinéma, il se consacre à l’écriture à partir de 1997. Il est l’auteur mondialement connu de romans noirs couronnés par les prix les plus prestigieux. Il est traduit dans 40 langues.
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