La muse au champ
Au maquis de la canne, en fleur, tu me devances,
Dispersant la rosée comme un vif goupillon,
Ta course m’échevelle et mes soupirs immenses
Sur tes nattes font battre les nœuds papillons.
Bondissante aux ardentes saillies des rayons,
Tu te moques de moi, te dévêts de tes soies
Dont tu jonches le sol comme de vils haillons,
Et, libre, tu t'ébats comme Eve et me dévoies.
Guignant l'archer, dans la cannaie, tu voltes
Indifférente aux griffes des paillons.
L’œil agrippant tes mollets désinvoltes
Je me délure au gré de tes sillons.
Me dérobant le fil de l'écheveau,
Tu te dépars d’un saut de mon atteinte,
Et tu me perds, puis parais à nouveau
Pour m'entrouvrir un autre labyrinthe.
Ainsi sois-je à jamais le soufi de ma femme,
La petite fumée qui suit ses tourbillons !
Qu'elle reste l'armide animant mon calame,
La dictatrice nue de mes divagations !
Patryck Froissart
(Extrait de "La mystification")
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