La Huitième Reine, Bina Shah (2ème critique)
La Huitième Reine, février 2016, trad. anglais Christine Le Bœuf, 360 pages, 23 €
Ecrivain(s): Bina Shah Edition: Actes SudAprès de nombreuses années d’exil, suite à une amnistie, Benazir Bhutto atterrit à Karachi le 18 octobre 2007. Elle est pressentie pour devenir de nouveau premier ministre du Pakistan.
Ali Sikandar, à la fois étudiant à Bhutto University et reporter pour la chaîne de télévision privée City24 News, est chargé de couvrir l’évènement. Un attentat a lieu, tuant plus d’une centaine de personnes dont Haroon le cameraman d’Ali. Ce dernier qui sort très choqué de cette épreuve est amené à se poser des questions.
Personnage central, de ce livre, Ali a une vie un peu particulière. Expatrié pendant un certain temps à Dubaï pour suivre ses études, il est obligé de rentrer à Karachi pour aider sa mère et ses frères et sœurs. Son père, qu’il hait, a abandonné sa famille pour se remarier. Ali cache cette situation à ses proches et prétend que son père est mort. Il a peur d’être détesté non pas tellement pour le remariage de son père que pour les origines de ce dernier. C’est un Pir, un féodal appartenant à la classe dominante accusé d’exploiter le peuple. Ali, comme tous jeunes de son pays, se pose des questions sur la politique du Pakistan et ses dérives. Il se demande s’il doit rester ou préférer à nouveau l’expatriation. Dans sa chair, il vit douloureusement son amour pour sa fiancée hindoue à qui il a aussi caché ses origines.
Parallèlement à l’instabilité présente de ce pays, ce livre, par des incursions dans le passé, nous rappelle ce que fut le Pakistan et plus particulièrement le Sindh, l’une de ses quatre provinces fédérées, située le plus au sud du pays, entourée du Baloutchistan à l’ouest et au nord, du Pendjab au nord, du Rajasthan indien à l’est et enfin du Gujarat et du Rann de Kutch au sud. Cette région, qui a conservé les vestiges de la civilisation de l’Indus célèbre pour sa haute élévation spirituelle et artistique, est à la fois le berceau de la famille d’Ali et celui de la famille de Benazir Bhutto. C’est un lieu de gros propriétaires terriens. D’abord rattaché à l’Inde, il devint autonome, et pour ses richesses fut particulièrement convoité. Il a été notamment occupé par les anglais avant de se trouver rattaché au Pakistan.
La Huitième reine est le nom que l’auteur donne à Benazir Bhutto. Il est à rapprocher de l’histoire des Sept reines que l’auteur attribue au grand poète Shah Abdul Latif de Bhit qui l’aurait écrit lors de son voyage dans le Risalo.
Ce livre a reçu en 2010 le Premio internazionale au festival littéraire d’Amalfi en Italie
Jean-Jacques Bretou
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