La fresque, Eliane Serdan
La Fresque, mars 2013, 160 pages, 12,50 €
Ecrivain(s): Eliane Serdan Edition: Serge Safran éditeur
Qu’est-ce qui nous aide à vivre le mieux ? Cette question, que nous nous posons tous à un moment ou à un autre de nos vies, est le thème du roman d’Eliane Serdan, La Fresque. Le récit se déroule à Sienne, dans la dernière décennie du XVe siècle. Pandolfo Petrucci a pris le pouvoir dans cette ville, il y règne en tyran implacable. Il se heurte à l’opposition des grandes familles et mène une diplomatie délicate avec les villes-états de Florence et de Milan. Tous ces bouleversements politiques contraignent Gian Di Bruno à fuir la ville de Sienne et à se réfugier sur le Casentino dans la maison inhabitée de son ami Paolo. Les complots vont bon train, les Vénitiens soutiennent Pise et veulent étendre leur influence à Sienne…
Très vite, l’exil conduit Gian Di Bruno à des interrogations multiples : elles portent sur son enfance, sur l’impact de l’exil : « L’exil est avant tout la fin d’une harmonie. Quand je vivais à Sienne, je ne prenais jamais le temps de contempler les cyprès ou l’ocre d’un chemin mais je sais, maintenant que s’instaure entre le paysage et moi un désaccord de tous les instants, quelle était la force du lien qui nous unissait ».
Gian évoque aussi la mémoire de son épouse, décédée : « Mais j’ai aimé. Il y a si longtemps que je croyais l’avoir oublié. Je croyais avoir effacé de ma mémoire celle qui avait donné un visage au bonheur et à la trahison. J’avais vingt ans. Il n’y a pas eu d’autre amour ».
Pourtant, Gian Di Bruno croira renaître. Dans un premier temps, il nourrit un grand amour pour Leilia Charimonti, femme rencontrée sur son lieu d’exil ; il pense se régénérer, accéder à la plénitude enfin retrouvée mais ce sont le pouvoir des mots et l’écriture qui seront à l’origine de son salut personnel. Il perçoit l’intelligence humaine comme « un voile opaque entre le monde et nous ». L’amour est perçu par Gian comme une illusion, il trouve la paix dans l’écriture : « J’écris toutes les nuits, l’écriture ne me console pas de la vie. Elle m’en donne une autre ».
Gian finit par ne plus craindre la solitude et admet que l’amour ne se remplace pas. On le voit, ce roman décrypte les étapes traversées pour accéder à la maturité, au détachement de l’individu face au monde.
Epicure n’aurait pas renié cet accès au bonheur, empreint d’ascétisme et de renonciation aux désirs matériels en pleine harmonie avec sa philosophie. Le roman d’Eliane Serdan n’est pas un roman historique ; il revêt un aspect intemporel par le dépouillement du style de l’auteure, qui fait gagner le récit en efficacité. L’écriture est épurée, elle illustre éloquemment les étapes d’une vie, nécessaires à la découverte de la vérité personnelle de Gian Di Bruno.
Stéphane Bret
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