La boucle
J’ai drogué ma jeunesse en de fumeux troquets,
J’aimais tant mes vingt ans que je les ai croqués,
J’ai pratiqué la gueuse et j’ai couru l’outrance,
Je n’ai pas vu ma muse en cette folle errance.
J’ai cherché dans la glèbe un sens à l’existence,
Dépaysé ma clique à l’écart de la danse,
Semé mon grain, pétri mon pain… pour dire vrai,
Il n’est pas d’ambroisie dans le fromage frais.
J’ai déserté la terre où mes aïeux sont nés.
Puisant aux lèvres d’or d’ardentes vahinés,
J’ai composé des lais. Ces amours bucoliques
Ne m’ont pas fait le roi des chantres poétiques.
Revenu, je sillonne un long champ monotone,
Ma vie n’est qu’un automne où nul éclair ne tonne,
Un séjour désolant dans l’an qui va, trop lent
Bien qu’à tirer les nuits je me pende au palan.
Patryck Froissart : Vers pour le Fossoyeur
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