L’école coranique, une bombe à retardement !, par Amin Zaoui
Chez nous, comme partout dans les pays musulmans et dont la société est islamisée, la réconciliation avec la modernité, l’adhésion à l’ère du temps, le respect de la raison commencent, d’abord, par une profonde et courageuse réforme de l’école coranique. Une école discrète mais décisive ! Oubliée mais hautement réveillée ! Marginalisée mais efficace !
Les écoles coraniques ne sont pas naïves, ni innocentes d’ailleurs. Elles sont directement ou indirectement le nid propice des partis salafistes et l’oxygène favori des frères musulmans. Les partis islamistes misent beaucoup sur cette institution pédagogique avec son idéologie stricte et précoce. Pour avancer dans la réforme politique ou pédagogique, il faut revoir, et avec courage, les programmes, les méthodes et les sources de financement de ces écoles et des associations qui sont derrière. L’Histoire nous a appris que le nazisme se basait sur tout un programme spécial destiné aux enfants, qui ensuite deviendront les durs soldats défenseurs des idées nazies.
L’enfant face à son maître coranique, un maître souvent bondé d’idées des prédicateurs salafistes moyen-orientaux, se trouve en proie à un lavage de cerveau prématuré. En général, l’enfant âgé de quatre à cinq ans, et dès les premiers pas dans un espace d’apprentissage public, croit en tout ce qui lui est dicté par le maître, emblème de la vérité absolue et guide dans le droit chemin !
Précocement, à l’école coranique, dans un discours religieux bourré de versets coraniques et de hadiths, on commence à parler à l’enfant de quatre ans de la prière de mort (salat el janaza). De la toilette des morts (ghassl el mayit). De la torture de la tombe (ahwal el kabr). Des tortures inimaginables et atroces pratiquées à l’encontre des non-musulmans, dans l’enfer. L’enfant est traumatisé ! le trauma chronique ! Par ce discours religieux violent et périlleux, la première image du Dieu qui s’installe dans la tête de l’enfant est celle d’un Dieu sévère. Un tortionnaire. Un passionné de sang. Un Dieu qui n’est là que pour surveiller nos erreurs afin de nous torturer. Un Dieu qui aime torturer ses créatures. L’image d’un Dieu d’amour, celle d’un Dieu de bonheur, d’un Dieu clément est complètement bannie de la tête de l’enfant coranisé. Dans ce traumatisme idéologique religieux, l’enfant n’aime pas Dieu, mais il a peur de Lui. Tout ce qu’il fait dans la vie c’est par peur de ce Dieu et pas par conviction ou par amour.
Une fois le lavage de cerveau réalisé, possédé par la présence de son maître coranique, porteur de la parole de Dieu, l’enfant rejette tout ce qui est opposé ou contradictoire aux propos de ce dernier. Tout entourage familial ou sociétal devient, dans l’imaginaire de l’enfant, suspect. Douteux. Faux.
Le maître coranique est la vérité absolue. La méfiance commence à s’installer dans sa tête. L’hostilité gagne peu à peu son comportement envers l’autre, qui ne lui ressemble pas. Il commence par éviter les autres. Le monde devient de plus en plus étranger. Petit à petit, les parents deviennent des ennemis, parce qu’ils ne font pas la prière, parce qu’ils regardent un film à la télévision. Parce que la maman met du vernis à ongles. Met du rouge à lèvres ! Une distance s’installe entre lui et ses parents. Petit à petit, l’enfant est embarqué dans un monde qui ressemble aux camps des enfants nazis. L’idéologie prend le dessus par rapport à la vie. La haine à la place de l’amour. La solitude à la place de la vie familiale ou collective. L’enfant est prêt à tuer. Est prêt à fuguer. Est prêt à être violé par son commandant. La soumission absolue aux ordres de son maître. En Algérie, la réalité amère qu’a vécue le peuple pendant la décennie noire, nous a montré comment le fils, avec sang-froid, a tué son père, avec sang-froid a égorgé sa sœur, avec sang-froid a éventré sa mère.
L’école coranique ne diffuse plus la culture de la spiritualité humaine, de l’amour et du rêve, qui jadis fut honorablement portée par les écoles des zaouaya. L’école coranique est devenue une machine productrice de la haine, de la mort et des milices suicidaires.
Aujourd’hui, vu le vide culturel et artistique, même si l’école publique, avec les efforts fournis ces deux dernières années, à travers les nouvelles reformes des programmes, le résultat demeurera minime si cette réforme n’arrive pas à désamorcer cette bombe à retardement qui est l’école coranique.
Amin Zaoui
(In "Liberté", Alger)
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