L’amie, la mort, le fils, Jean-Philippe Domecq (par Jean-Jacques Bretou)
L’amie, la mort, le fils, septembre 2018, 128 pages, 14,50 €
Ecrivain(s): Jean-Philippe Domecq Edition: Thierry MarchaisseLe 21 juillet 2017, alors que l’auteur se trouve en vacances avec son fils Guilhem, à Ramatuelle chez le père d’Anne Dufourmantelle, compagne de Frédéric Boyer, ce dernier est appelé d’urgence sur la plage de Pampelonne, à Saint-Tropez, où un accident est arrivé à Anne. Jean-Philippe Domecq conduit son ami, F. Boyer, sur le lieu de l’accident. Ils découvrent la conjointe de l’écrivain allongée sur le sable, entourée de secouristes. Elle a été prise d’un malaise après avoir sauvé des enfants de la noyade, dont Guilhem, le fils de l’auteur. Les pompiers et les médecins ne pourront rien faire, Anne est morte. Le surlendemain après une veillée mortuaire, Domecq et son fils partent « en pèlerinage » à Chamonix, avant de revenir assister aux funérailles d’Anne et de repartir, le fils avec sa mère, le père dans le Cotentin.
Ce livre est écrit dans le chagrin qui ne « quitte » pas J. P. Domecq : « (…) j’essayais juste de raconter. Mais je n’avais pas prévu de raconter non plus, quand j’ai commencé. Je sais seulement que je ne le fais pas par besoin de guérir, on n’a aucune envie de guérir d’un chagrin – le chagrin est tout ce qu’il y a de fidèle ». Ce texte est comme un thrène, ayant pour thème la fidélité. Être fidèle en amitié jusque au-delà de la mort. L’amitié commune à tous : Anne, Boyer, auteur du fameux Mes amis mes amis, Domecq et les autres.
Le narrateur évoque la Pavane pour une infante défunte de Ravel lorsqu’il voit lors de la veillée funèbre la gisante : « me revient à la mémoire la vague alanguie de mélancolie lointaine et suave dont on voudrait qu’elle ne cesse jamais, suprême et douce comme était Anne ». Elle était belle comme toujours et comme jamais : « Oui, elle était particulièrement belle, très concentrée sur sa mort », dit Boyer. Psychanalyste, philosophe, auteure, elle avait par ailleurs une réputation mondiale. C’est un personnage qui s’est éteint. Domecq se souvient après la découverte du drame de l’étrange ballet des gens dans la cour de la propriété, du chœur pour reprendre la métaphore du thrène, appelant ou recevant des coups de téléphone de par le monde. Il se souvient de ses discussions avec la disparue qui avait écrit un Éloge du risqueet lui rappelant que l’on avait toujours un Kafkaen soi. De l’idée qu’il avait partagée avec elle d’ouvrir un cabinet de psychanalyste pour mette en pratique son idée de « Thanathérapie ».
C’est un très beau livre que nous offre Jean-Philippe Domecq, un texte écrit pour continuer malgré le chagrin, ne pas abandonner malgré la douleur parce que la mort n’est rien à côté d’une mort. Mais qu’au-delà à force de persister on finira comme l’écrit A.D. dans Une question d’enfant par découvrir « Cette chose qu’on appelle la grâce. L’inespéré ».
Jean-Jacques Bretou
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