Inventaire du vide comme neige et fleurs non répertoriées, Dominique Sampiero (par Philippe Leuckx)
Inventaire du vide comme neige et fleurs non répertoriées, Dominique Sampiero, éditions de Corlevour, 2023, 144 pages, 18 €
Le poète « nordiste », né en 1954, dans ce livre copieux, tutoie l’inconnu, élargit « l’immense tente », et « mes yeux touchent le sommeil ».
Structuré en trois parties (dont les titres jouent de l’espace et du corps), le livre révèle nombre d’apprentissages sinon de victoires sur le vide, le rien, le non-être, l’identité trompeuse.
La langue, le plus souvent en morceaux de prose, est prise sur l’attente, le silence, la surface du monde ; la mort, certes, est à l’avant-poste : que de trous à combler, que d’enterrements de mots et de morts.
Dans « l’inventaire » à établir, la présence de ce qui peut se perdre, s’oublier, être négligé, est prégnante :
J’avance dans les hautes prairies
de la lumière
mon passage écarte les corps
les plus tendres (p.51).
Le poète, très souvent, s’adresse à lui-même, à ce « tu » des mots, à ce « toi » qui « invente une langue », à cette « voyelle d’âme errante » ou est-ce alors la « présence » d’une sorte de métaphysique à laquelle il ne croit guère, lui que dévorent le manque, le doute, le néant ?
Sampiero use de mots qui reviennent comme des thèmes de son exploration, comme des termes (limites) à ce qui peut en être dit : mordre, ronger, perdre, trou, vide, chair, toucher…
Au « visage des absents », le poète répond d’une salve de poèmes qui ébruitent le peu, laissent en liasses des métaphores folles (bout de ficelle pour survivre), habillent le vide des vêtements sombres de l’espoir brisé (j’espère que nous allons renaître/puis mourir à nouveau).
Bref, l’inventaire reste pesant, loin de la joie, tissé de part en part d’une « lumière comme un corps étranger ».
L’écriture, remarquable, fore le corps en souffrance, le révèle à lui-même.
Philippe Leuckx
Dominique Sampiero, poète français, est l’auteur d’une centaine de livres. Citons, pami les derniers : Où vont les robes la nuit ; L’autre moitié de ton corps ; Lady ciel.
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