Instapoèmes, Matthias Vincenot & Julie Biet (par Murielle Compère-Demarcy)
Instapoèmes, Matthias Vincenot & Julie Biet, Les Éditions du Mont-Ailé, juin 2019, 104 pages, 18 €
À chaque poème son Instant, chaque Poème a son Instant… Ce beau livre l’illustre, où les poèmes de Matthias Vincenot répondent aux photographies de Julie Biet, à moins que ce ne soit l’inverse… Peu importe quel regard fait écho à l’autre, tant l’osmose existe dans cette partition artistique focalisant en un même point de rencontre l’émotion d’un « Instapoème » à partager.
« Un Instapoème », ou poème de l’instant, est-il écrit en quatrième de couverture, « c’est une rencontre d’arts, où les poèmes de Matthias Vincenot et les photos de Julie Biet se font écho, les uns n’existant pas sans les autres ».
Sorte d’agenda perpétuel décliné sur une année et bien qu’il soit daté (du 22 juillet 2018 au 30 juin 2019), cet Instapoèmes a saisi dans ses textes/a capturé dans son objectif photographique, cet Instant d’éternité que peut prendre notre présent tout au long des saisons, à son rythme, à sa cadence, pourquoi pas sur l’air entonné d’une chanson, quel que soit notre espace-temps particulier.
Chaque cliché, avec sa luminosité particulière, chaque poème qui l’accompagne, a en effet une résonance universelle et parvient, par un supplément d’âme fusionnel, à délocaliser des instants de vie qu’ils colorisent et nous refont vivre par leur étincelle de créativité.
Couleur nostalgie : « Trouver les mots pour dire… / Ou tout restera fermé / À s’effriter avec le temps / Le temps de dire évaporé »,
ou encore comme écrit à la craie sur tableau noir, ici sur toile de fond minéral signé Julie Biet : « Dans la classe, les rêveurs du fond / Savent imaginer des arbres au plafond / Suis-je encore comme eux quand je pense à de l’air / À des murs de pierre, à des parfums verts ? »,
ou nuance sentimentale : « Les sentiments ont des couleurs / Qu’on n’approche jamais vraiment / Dans le langage / si les fleurs finissent à l’eau / On aura tenté l’abordage »,
ou fenêtre ouverte sur l’avenir : « Comme le printemps qui hésite à forcer un peu le chemin / Un vélo qui attend qu’on le prenne en main / Démarrera bientôt, puis on ne le verra plus / En oubliant pourquoi il nous fera du bien ».
Le poète Matthias Vincenot a des raccourcis dans la matière – textile et velours – de la Langue, qui approfondit sa voix et, nous l’imaginons, motive et oriente le regard créatif aussi de la photographe Julie Biet.
Cet opus à deux mains (Matthias Vincenot au Poème, Julie Biet à la Photographie) nous offre un riche nuancier de saveurs éphémères, comme nous en offre la vie de chaque jour. Les poèmes de Matthias Vincenot y ressemblent à des papillons traversant les ambiances photographiées par Julie Biet, le temps d’un réel au vol éphémère remuant un battement de cils dans ses nuits, ses altitudes, sa clarté onirique ou ses éclairages diurnes. Un Éphémère en route vers l’Eternité.
Le lecteur papillonne, se pose, se stationne en pause imaginaire ou en mode souvenirs, en feuilletant ce très beau livre où l’Art d’écrire et de capter la vie en la photographiant l’invite à autant de voyages que de pages à observer / lire / tourner, où se souvenir / rêver…
Murielle Compère-Demarcy
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