Hommage à Baudelaire IX - En toi, par Hans Limon
En Toi
dans tes flancs ébahis, cachot dévergondé,
s’enlise mon forçat, des tonneaux débondés
sourd la férocité, trempée sous les aisselles
par les rues, Dieu soit loué, glissent mes hirondelles
déchausser nos désirs, envers et contre moi
si l’on pouvait gésir, une ou deux fois par mois
ta pluie saurait suffire à souffler mes effrois
si l’on pouvait gémir à dévoyer nos voix
sur mes flots élargis, nappes d’huile essentielle,
miroitent par tombeaux des petits bouts de ciel
l’Enfer à fleur de peau réclame son loyer
ton corps nu, par Satan, diffame son noyé
la clé des champs respire à l’orée des chevets
danse, danse et chavire, et sombre tout entier
la valse des soupirs languit de s’achever
s’étouffent les remords : Dieu me prenne en pitié
Hans Limon
A celle qui est trop gaie. Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
Ta tête, ton geste, ton air
Sont beaux comme un beau paysage ;
Le rire joue en ton visage
Comme un vent frais dans un ciel clair.
Le passant chagrin que tu frôles
Est ébloui par la santé
Qui jaillit comme une clarté
De tes bras et de tes épaules.
Les retentissantes couleurs
Dont tu parsèmes tes toilettes
Jettent dans l'esprit des poètes
L'image d'un ballet de fleurs.
Ces robes folles sont l'emblème
De ton esprit bariolé ;
Folle dont je suis affolé,
Je te hais autant que je t'aime !
Quelquefois dans un beau jardin
Où je traînais mon atonie,
J'ai senti, comme une ironie,
Le soleil déchirer mon sein ;
Et le printemps et la verdure
Ont tant humilié mon coeur,
Que j'ai puni sur une fleur
L'insolence de la Nature.
Ainsi je voudrais, une nuit,
Quand l'heure des voluptés sonne,
Vers les trésors de ta personne,
Comme un lâche, ramper sans bruit,
Pour châtier ta chair joyeuse,
Pour meurtrir ton sein pardonné,
Et faire à ton flanc étonné
Une blessure large et creuse,
Et, vertigineuse douceur !
A travers ces lèvres nouvelles,
Plus éclatantes et plus belles,
T'infuser mon venin, ma soeur !
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