Histoire du fils, Marie-Hélène Lafon (par Philippe Leuckx)
Histoire du fils, août 2020, 176 pages, 15 €
Ecrivain(s): Marie-Hélène Lafon Edition: Buchet-Chastel
Le Prix Renaudot 2020 va à une romancière française d’une dizaine d’ouvrages pour une chronique familiale.
Lafon a-t-elle nourri son roman des œuvres romanesques d’un Mauriac ou d’une Suzanne Prou ? On pourrait le pressentir vu la matière abordée.
Jouant de la chronologie et d’un siècle l’autre (entre 1908 et 2008), le livre révèle les secrets d’une famille cossue. La narration avance ainsi à grands pas pour suivre de près les personnages principaux de cette saga généalogique. En effet, ce « fils » du titre n’a pas de père connu, est élevé par sa tante Hélène, tandis que sa mère Gabrielle vit sa vie à Paris. Entre Paris et Chanterelle, dans le Lot, l’histoire dévide ses attendus, ses surprises, ses découvertes. On suit ainsi deux familles, les Léoty, les Lachalme, pressentant les liens, les alliances.
Les deux familles ont leur lot d’événements.
Le « fils » André a cru longtemps être le fils d’Hélène et de Léon, entouré de ses sœurs. La quête du père biologique est venue bien plus tard, comme une nécessité vitale, un lien à recoudre avec son passé.
« André avait toujours eu deux mots pour ses mères ».
D’une époque l’autre, la romancière brosse un tableau des usages bourgeois, parisiens et provinciaux. Ces gens-là vivent bien, n’ont aucun souci d’argent, se soucient des réputations et des emplois sûrs.
La langue, sûre, économe, dresse des portraits de personnages ancrés dans le confort et les belles vertus. Je vous le disais, Prou n’est pas loin. Il y a peut-être ici davantage de bienveillance, moins d’acidité dans la description des conventions.
Tout beau roman est une histoire. Certes, le principe généalogique tisse et attise les mystères : quoi de plus intrigant que cette quête du père, inconnu, poursuivi pour qu’il y ait un peu de traces et de raisons de vivre à l’arrivée ?
Lafon, en dépit du nombre des personnages, livre une narration assez claire pour que le lecteur puisse suivre les arbres généalogiques sans s’encombrer ni gâcher son plaisir.
Sans doute certains trouveront-ils la matière un peu désuète – ah ! ces bonnes familles à secrets !
D’autres partageront la reposante lecture de destins brisés que le romanesque a la vertu de recoudre à gros points.
Philippe Leuckx
Marie-Hélène Lafon est une romancière française. Elle a notamment publié : Le soir du chien ; Liturgie ; L’annonce. Et a obtenu le Prix Renaudot des Lycéens 2001, et le Goncourt de la nouvelle 2016.
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