Entretien avec Marie Renault, fondatrice et directrice des éditions Macha Publishing
Depuis 2009, Marie Renault dirige une société de packaging qui réalise et développe des livres et des magazines pour le compte de grands groupes éditoriaux, et principalement orientée vers l’Europe de l’Est et la Russie. Entourée de son équipe d’auteurs, de graphistes et de traducteurs, tous aussi passionnés qu’elle, elle officie encore aujourd’hui très largement dans ce domaine d’activité, car il s’agit pour elle d’une source dans laquelle elle puise des échanges enrichissants et nécessaires qui lui permettent de donner vie à des projets passionnants sur les sujets les plus variés. Mais en 2015, elle a décidé de créer sa propre maison d’édition, Macha Publishing. Un tel acte de bravoure, par les temps qui courent, méritait que l’on s’y intéresse.
La Cause littéraire : Marie Renault, qu’est-ce qui vous a conduit à lancer Macha Publishing, pour vous frotter à l’édition pure ?
Marie Renault : Ma propre expérience de près de quinze ans dans l’édition m’a appris qu’un bon livre doit proposer un regard nouveau, doit apporter quelque chose à son lecteur. Même s’il ne s’agit que d’une heure de divertissement, il est le résultat d’un processus créatif qui lie l’auteur et l’éditeur. Il nous a semblé, chez Macha, au bout de six ans de développement de projets éditoriaux pour d’autres maisons, que nous avions cette possibilité de proposer au grand public des ouvrages un peu différents de ceux qui existent sur le marché. Grâce à la connaissance approfondie et authentique de la Russie, l’équipe de Macha peut également créer un pont culturel entre ce pays et la France. Les auteurs russes contemporains sont finalement peu connus, ici. Nous ne nous limitons pas à la création autour de la Russie, mais il est vrai que nous disposons d’un certain nombre d’ouvrages grâce auxquels nous pouvons découvrir la Russie moderne, loin des clichés qui empêchent d’en mesurer pleinement toute la richesse et toute la culture. C’est dans cette optique que nous avons choisi nos premières publications, il y a un an, grâce au soutien de notre équipe de diffusion, la Cedif, que je tiens d’ailleurs à remercier, car ce sont des gens formidables. Grâce à leur travail, nos livres sont correctement distribués dans toutes les librairies en France.
Pouvez-vous nous présenter votre ligne éditoriale, vos différentes collections, vos auteurs ?
Macha Publishing est une maison d’édition généraliste qui construit ses publications autour de plusieurs collections essentielles. La collection « Regards sur le monde » réunit des essais documentaires qui donnent des clés pour comprendre certains événements majeurs du monde contemporain (l’ouverture sur Cuba, la Syrie comme épicentre de la guerre contre l’Occident, etc.). La collection permet d’avoir un recul historique et de se forger ses propres jugements, en dehors des idées admises dans les médias. Le prochain livre à paraître est consacré aux États-Unis, à un tournant de leur histoire, et à Hillary Clinton. Il sort en novembre 2016 dans toutes les librairies.
La collection « Trésors retrouvés de la littérature » a pour mission de redécouvrir quelques grands classiques français oubliés.
« Développement de soi » vous prodiguera, sous forme humoristique, des conseils sérieux.
Avec « Roman étranger », les lecteurs se régaleront de traductions des plus grands succès russes et apprendront à connaître des auteurs de talent – Astvatsaturov, Abgaryan. Ils découvriront aussi de magnifiques romans américains pour la jeunesse.
Nous terminerons par la collection « Beaux livres », dont le nom parle de soi-même. Les premiers ouvrages sont consacrés aux trésors non exposés de l’Ermitage et au centenaire de la révolution russe.
Macha Publishing apparaît donc comme une maison d’édition très généraliste, à une époque où on conseille plutôt aux éditeurs émergeants de se spécialiser dans un créneau très précis, dans un genre très ciblé. Quelle est la raison de votre choix contraire ?
Notre slogan, c’est « un livre, un pas vers la liberté ». C’est donc une liberté de proposer notre choix d’ouvrages dans des domaines que nous connaissons et maîtrisons bien et que nous pensons pouvoir faire évoluer. Je prends comme exemple le livre illustré de la collection Regards sur le monde, qui parle des changements profonds dans les différents pays du monde. Aux textes d’analyse historique et politique nous associons des photos et des illustrations qui permettent de rendre la lecture plus riche, le récit visuel complétant le récit textuel. Ce type d’ouvrages illustrés est peu répandu actuellement. Je peux également évoquer notre collection sur les classiques oubliés, et en particulier les textes érotiques méconnus écrits par de grands auteurs. À travers nos couvertures très modernes, nous essayons de rappeler que ces auteurs restent étonnamment contemporains, jeunes et qu’ils ne doivent pas être oubliés sur les rayons des bibliothèques universitaires. Nous ne voulons pas donc nous limiter à un seul genre de publication, mais nous travaillons en même temps dans le cadre de collections conçues rigoureusement, ce qui permet de canaliser nos choix, de leur donner un vrai sens.
Comment envisagez-vous le développement de votre activité éditoriale, avez-vous des projets, des idées ?
Nous aimerions continuer à sortir une quinzaine de titres par an, dans toutes nos collections, et nous espérons surtout qu’ils trouveront un large lectorat. L’objectif est que notre maison s’installe dans le paysage éditorial français et qu’elle y vive longtemps.
Souhaitez-vous nous présenter un ou deux titres en particulier ?
Oui, avec plaisir. Je mettrais tout d’abord en lumière Les Bijoux indiscrets, de Denis Diderot, un livre osé, une fantaisie érotico-orientale inattendue de la part de l’auteur de la célèbre et très sérieuse Encyclopédie. Et je vous encourage enfin à parcourir le beau livre Révolution, 100 ans d’Octobre rouge, consacré au centenaire de la révolution russe de 1917. Il s’agit là d’une promenade inoubliable, à travers une période qui a marqué l’histoire, et qui aboutit à la construction d’une société nouvelle, aussi bien sur le plan esthétique que sur le plan humain.
Laurent Bettoni
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