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Dictionnaire de l’autobiographie, Écritures de soi de langue française, Collectif (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier 18.11.20 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Editions Honoré Champion

Dictionnaire de l’autobiographie, Écritures de soi de langue française, Collectif, Françoise Simonet-Tenant, Michel Braud, Jean-Louis Jeannelle, Philippe Lejeune, Véronique Montémont, 846 pages, 28 €

Edition: Editions Honoré Champion

Dictionnaire de l’autobiographie, Écritures de soi de langue française, Collectif (par Gilles Banderier)

 

« Je… je… je… moi… moi… moi… » : qu’on s’en réjouisse ou qu’on s’en hérisse, l’augmentation quantitative (certains parleraient d’inflation morbide, voire de prolifération maligne) des écrits à la première personne du singulier est un trait caractéristique de la modernité (un concept moins facile à définir qu’il n’y paraît). Tout se passe comme si l’admonition de Paul Valéry (« Qui se confesse ment, et fuit le véritable vrai, lequel est nul, ou informe, et, en général, indistinct ») avait été proférée dans le vide.

Le Dictionnaire de l’autobiographie que publient les éditions Champion est, pour qui s’intéresse aux « écritures de soi » ou « du moi », un outil remarquable, appelé à devenir un usuel et à être conservé sous la main. 457 entrées rédigées par 192 collaborateurs permettent un large tour d’horizon. L’autobiographie est envisagée dans son extension chronologique (depuis l’Antiquité) et géographique (même si le sous-titre du volume indique que les textes en langue française seront privilégiés, les comparatistes trouveront leur bien dans les notices consacrées à l’Italie, aux Caraïbes, à l’Afrique ou à la Russie).

En dehors des entrées particulières, plusieurs articles répartis sur vingt-six pages brossent une histoire de l’autobiographie en France. Les aspects matériels de l’écriture ne sont pas négligés (entrées « cahier », « carnet », « machine à écrire », « ordinateur », etc.). Une entreprise de ce genre et de cette envergure suppose des choix, qui peuvent être contestés. Une attention sans doute excessive (est-ce une manifestation du complexe de Sainte-Beuve, qui envahit souvent les études littéraires ?) a été portée à des figures mineures et contemporaines, dont rien ne nous assure qu’elles seront encore connues de la prochaine génération. L’évaluation des écrivains récents est toujours un exercice délicat, entre ceux dont l’importance finira probablement par apparaître (Pierre Bergounioux) et ceux qui se trouvent déjà à mi-pente de l’oubli complet (Jacques Borel, prix Goncourt 1965). Des personnalités controversées (pour des raisons qui ne relèvent pas tout à fait de la littérature), comme Gabriel Matzneff ou Renaud Camus, n’ont pas été laissées dans l’ombre. La spécificité de l’« autobiographie beure » par rapport à l’autobiographie en général ne saute pas aux yeux. Ce volume de grande qualité montre qu’à l’heure de la dilution des savoirs sur le réseau Internet, où l’excellent côtoie le n’importe quoi sans que rien ne guide le lecteur (si ce n’est une éducation qu’il a dû recevoir ailleurs que sur la Toile), un ouvrage intelligent, cohérent et bien conçu rend encore et toujours les plus grands services.

 

Gilles Banderier


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A propos du rédacteur

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Docteur ès-lettres, coéditeur de La Lyre jésuite. Anthologie de poèmes latins (préface de Marc Fumaroli, de l’Académie française), Gilles Banderier s’intéresse aux rapports entre littérature, théologie et histoire des idées. Dernier ouvrage publié : Les Vampires. Aux origines du mythe (2015).