Dans le vert des montagnes En cheminant avec Gaspard, Jacques Viallebesset
Dans le vert des montagnes En cheminant avec Gaspard, éditions Entrelacs, janvier 2018, 82 pages, 16,50 €
Ecrivain(s): Jacques Viallebesset
Entre conte et récit raconté à la lumière de l’âtre, et dans l’esprit des beaux romans nature d’Henri Pourrat (1887-1959) et de l’un de ses héros fétiches, Gaspard, Jacques Viallebesset nous offre un beau brin de montagne et d’aventure retour dans le passé « chaumières, escapades au frais de la forêt, amitié et solidarité des pauvres ».
Son héros, dont le recueil donne à lire toute l’histoire, vit au vert, dans le vert de ces hauteurs suisses et autres, à « l’appel de la forêt » – London, ses trappeurs, ses neiges, ses forêts ombreuses, ne sont pas loin –, devient un proche familier du lecteur, au fil de ces très longs poèmes aux titres éclairants : « La forêt d’enfance », « Par monts… », « Batailles du haut pays »…
Il y est question de bandits qui dépouillent, de héros au grand cœur, de pauvres qui se portent les uns les autres.
Pour être traditionnelle (celle des fables, des beaux contes pour enfants), avec son lot d’images parfois naïves, et quelques clichés (« poudroie » « lumière de son cœur » ou « blondeur des blés »), l’écriture n’en est pas moins attachante lorsqu’elle dessine – bien – Au-dessus de la large vallée… la marqueterie des prés et des bois ainsi que les biefs vers l’enfance car l’enfance, c’est évident, la belle enfance qui nourrit durablement les âmes poétiques, sauve l’auteur et ses poèmes, pour lui, pour le lecteur, s’immisce dans les lisières rêveuses où l’amour, la cruauté et le désir de vengeance animent l’enfant blessé, trahi, enlevé. Jacques Viallebesset, cet « homme d’avoine folle », il le porte haut, dans les hauteurs des « aurores et des verveines ». Gaspard a trouvé là un chantre, puisque le risque est si prégnant :
On se perd dans cette vie comme dans les bois noirs
Nul ne peut remonter les biefs vers l’enfance
Se garder de tout mal jusqu’à l’innocence
Un jour gris vient qui tue les oiseaux de l’espoir(p.37).
Oui, « vivre est un long départ » et « le chagrin ruisselle des cœurs les plus ardents ».
Le lyrisme, avec Viallebesset, n’est pas mort. Et le conditionnel en offre des pépites :
Ce serait là dans la bruyère mauve
Une maison du bout du monde
Où la nuit faire l’amour comme le pain
Et se réveiller pieds nus dans l’aube (p.75).
Philippe Leuckx
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