Dans la peau de Maria Callas, Alain Duault
Dans la peau de Maria Callas, février 2017, 216 pages, 8,50 €
Ecrivain(s): Alain Duault Edition: Le Passeur
Spécialiste de l’Opéra et de l’Art Lyrique, Alain Duault nous propose ici d’entendre encore une fois la voix de la Callas, à travers l’évocation fictive de souvenirs, ceux qu’elle aurait pu se remémorer dans un journal intime sur les derniers quinze jours de sa vie. Rétrospective imaginaire d’un amoureux de musique en compagnie d’une des plus grandes voix lyriques.
Voix à la fois émouvante et dérangeante que celle d’Alain Duault qui se mêle à ce « je » fictif, celui de la Callas, dérangeante par la proximité qu’il entretient. C’est presque une voix de petite fille que l’on entend par moments, mais aussi celle d’une femme malheureuse au milieu de tout ce bonheur vécu dans la passion pour son art.
Quinze jours nostalgiques, quinze jours où la mélancolie et la remontée du souvenir nous placent au plus près d’une femme qu’on a aimée, qu’on aime et qu’on aimera longtemps et ce malgré le manque qu’elle-même a pu éprouver en ce domaine.
Les artistes en se donnant au plus grand nombre sont souvent seuls. On est touché par cette voix qui n’est pas la sienne et qui dit « J’ai tant donné et j’ai si peu reçu ».
Marquée à la naissance par le désamour de sa mère qui lui préférait sa sœur Jackie, plus belle, plus mince, une mère qui a refusé de regarder sa fille à sa naissance, un père absent qu’elle aimait pourtant, une enfance malheureuse et la découverte très tôt d’un talent qui la conduira aux plus hauts sommets. Un de ses professeurs lui a dit un jour qu’elle avait « un rossignol dans la gorge ».
Dans l’évocation de ces souvenirs, il y a ses tournées, les gens célèbres qu’elle a côtoyés, le luxe quotidien, les œuvres qu’elle a interprétées qui demeurent obsédantes et les hommes qu’elle a aimés passionnément ; Pier Paolo Pasolini ou Lucchino Visconti, tous deux préférant les garçons, ne lui apporteront qu’un amour fraternel auquel elle ne dérogera jamais, ils étaient des soutiens affectifs. Il y a eu aussi bien sûr Ari, ce cher Aristote Onassis qui l’a aimée mais s’est lassé, et lui en a préféré l’autre, une Jackie, encore.
Au final une vie sans amour, une vie à chanter Vissi d’arte, vissi d’amore, une vie de Tosca, Traviata, Médée, Lucia, des femmes de tragédie, des femmes de feu, passionnées et furieuses qu’aucun amour n’est venu apaiser ni combler.
« L’amour est une grande affaire. A l’Opéra toujours. Et sans doute dans la vie ». Mais « ai-je été aimée… ? ».
Femme passionnée, passionnelle, qu’on disait capricieuse mais plutôt victime des autres, en quête de cet élixir dont elle fut privée très tôt en naissant, que son talent n’a pas su étancher. Le don de sa voix divine guide sa quête vers le plus vaste, le plus grand des amours, et aussi le plus grand nombre, ses auditeurs, son public qui aujourd’hui encore, quarante ans après sa mort, continue de l’appeler la Callas, et d’aimer le « rossignol » de sa voix.
Marie Josée Desvignes
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