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D’Être en ce monde, Alexandre Blaineau (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres le 08.11.21 dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

D’Être en ce monde, Alexandre Blaineau, éditions Milagro, septembre 2021, 72 pages, 10 €

D’Être en ce monde, Alexandre Blaineau (par Didier Ayres)

 

Depuis l’Histoire

Pour moi qui aime voir et découvrir l’être derrière l’écriture, cette lecture a suscité en moi une sagacité réelle. J’ai, dans un premier temps, été pris par le caractère squelettique du texte. Cette forme moderne d’une « anorexie » volontaire, m’a fait songer au Bonnes de Genet – qui décrit sa pièce comme étant squelettique – tant le caractère lapidaire des poèmes semble faire référence à un univers froid, emprunt, sujet au détachement, à la distance.

 

Cette vallée devenue plaine

Vaste comme la main d’un dieu

Où s’imposent le toujours des puissances

Le paysage d’un feu nouveau

Et le regard inquiet des antilopes

Puis, soudain, à ma relecture j’ai compris que je ne pouvais me soustraire à ce que je savais de l’auteur, c’est-à-dire sa formation doctorale en histoire. Alexandre Blaineau parle de lui, à travers non pas des dates, mais d’une impression, celle de l’Histoire qui deviendrait un mythe – je songe souvent par devers moi à l’Atlantide.

 

Saveurs de la chair

Parfums des corps sur le marbre lisse

Muscles et veines jusqu’aux cassures

Nos regards et la blancheur

Les statues nous envient

 

Le poème cherche sa langue dans l’imaginaire, celle d’un rêve, un rêve d’Histoire. Donc, sujet à l’énigme. Et du reste, le caractère nu des poèmes facilite bel et bien cette tendance, celle de revivre des points iconiques de la grande Histoire. Quoi qu’il en soit, ce texte en filigrane nous montre des statues (antiques), des temples (envahis d’herbes sauvages) ou encore des aigles (ceux des augures romains). Ce recueil peut donc se présenter dans le très peu, comme si le lecteur pouvait déguster un hydromel gaulois ou un vin grec coupé de miel avec sobriété et songe, celui de vivre ailleurs et dans un autre temps, dans la durée du poème. Cela ressemble pour moi à la fixité des trésors archéologiques de Pompéi, ici pris dans la glace du poème, fixé pour toujours dans sa nudité lithique.

Concluons avec A. Blaineau et ce texte dépouillé et songeur :

 

La statuette encore prisonnière de son fossé est maculée de glaise

En s’approchant

On devine le visage serein d’une femme

Les plis délicats de son vêtement

Et les traces d’une polychromie sacrilège

 

Didier Ayres


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A propos du rédacteur

Didier Ayres

 

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Rédacteur

domaines : littérature française et étrangère

genres : poésie, théâtre, arts

période : XXème, XXIème

 

Didier Ayres est né le 31 octobre 1963 à Paris et est diplômé d'une thèse de troisième cycle sur B. M. Koltès. Il a voyagé dans sa jeunesse dans des pays lointains, où il a commencé d'écrire. Après des années de recherches tant du point de vue moral qu'esthétique, il a trouvé une assiette dans l'activité de poète. Il a publié essentiellement chez Arfuyen.  Il écrit aussi pour le théâtre. L'auteur vit actuellement en Limousin. Il dirige la revue L'Hôte avec sa compagne. Il chronique sur le web magazine La Cause Littéraire.