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Carnets d’un fou, XLV, par Michel Host

Ecrit par Michel Host le 16.12.16 dans Chroniques régulières, La Une CED, Les Chroniques

Carnets d’un fou, XLV, par Michel Host

 

« Non seulement Dieu n’existe pas, mais essayez d’avoir un plombier le week-end ! »

« Les religions sont des clubs qui engendrent l’exclusion. Elles favorisent le concept de l’autre : elles t’indiquent clairement qui tu dois haïr »

« L’éternité c’est très long, surtout sur la fin »

Woody Allen (Pensées éparses dans ses films)

 

#. Ouverture d’octobre. Parfois, et même souvent, j’ai envie de tirer la chasse d’eau sur le monde, ce besoin naturel. M’éloigner, oublier. Cela pue. Retrouver l’oued dans la montagne, la source dans la forêt.

On a tort de chercher les philosophes exclusivement dans les livres. D’autres sont plus proches et à notre portée, tel Woody Allen. Je partage ses pensées au point d’ignorer que je les partage, n’étant qu’un cinéphile d’occasion. Le philosophe patenté Alain me conseille de marcher en sens contraire de mes propres pensées, car selon lui « réfléchir c’est nier ce que l’on croit ». Je reconnais qu’il a raison, comme la marquise de Sévigné qui était fort « éloignée d’abonder dans [son] sens », mais en sachant toute la difficulté de l’affaire. Oui, pour l’instant je pense à la manière de Woody Allen, quoiqu’il me semble avoir pris un peu de retard sur son temps : désormais les religions, l’une d’entre elles en particulier, ne t’indiquent plus qui tu dois « haïr », mais qui tu dois « tuer ». Le progrès est dans les gènes de l’humain.

 

#. Bref séjour sur le boulevard Vincent Auriol. J’y étais, par obligation, ce samedi après-midi, attablé à la terrasse du Dudule. Pas le Fouquet’s, c’est sûr, mais en plein XIIIe arrondissement, devant la station de métro Italie, les arrêts des bus… Vincent Auriol, un président de la république dont personne n’a jamais su que faire, on lui attribua ce boulevard lointain (l’ancien boulevard de la Gare) dont nul ne savait que faire non plus. Ce fut donc, selon le mot d’une jeune amie qui a cessé de l’être, dans ce « quartier pourri » du XIIIe. Elle, héritière d’une famille de banquiers, vit quelque part sur le boulevard Saint-Germain, dans un vaste appartement dont elle fit l’acquisition sans avoir à lever le petit doigt, ni même à travailler, s’étant vite lassée des travaux de l’éducation nationale où elle eut la sotte ambition de s’engager un jour (1) et vivant désormais, bien que millionnaire, pour partie aux crochets de la république. Revenons au boulevard V. Auriol : la bonne demi-heure que j’y passai m’autorisa à voir les s.d.f. et leurs sacs tout toile et plastique, des jeunes hommes entrés dans l’obésité avant l’âge, des vagabonds sales et hirsutes traînant leur désœuvrement sur le trottoir, des jeunes filles, des femmes dépenaillées, inélégantes parce qu’on les aura persuadées de ce que l’élégance les mettrait au rang des bourgeoises ou des bourges, selon la langue d’aujourd’hui. Un défilé d’une tristesse infinie. La laideur et la pauvreté érigées en norme d’existence. La procession française d’aujourd’hui sous le signe du profit-roi, de l’égalité républicaine, quelque chose que l’on n’imaginait peut-être pas en 1920 et 1930. Je quitte les lieux.

Le 1er/X

 

#. Le pape François donne ses conférences de presse les plus prenantes dès qu’il voyage dans un avion. On suppose que dans la proximité céleste il se sent plus inspiré par le Bon Dieu. Ainsi, tout récemment, lors de son retour des régions du Caucase, il plaida avec éloquence pour que les enfants ne se laissent pas impressionner par la fameuse Théorie du genre, selon lui inscrite en filigrane dans les manuels scolaires français, que les petits garçons enseignés par l’école républicaine ne veuillent pas devenir des filles ni les petites filles des garçons. Le Bon Dieu, on le constate, est un sage et le pape François un aviateur qui aime à voir les choses de haut.

Le 3/X

 

#. On dit que le verdict de son jugement sera prononcé contre M. Cahuzac dans peu de semaines. Il est toujours en liberté, quoique surveillée. Il n’aura pas subi une minute de détention préventive et ne subira aucune détention pénale. Il a dissimulé au fisc des sommes inimaginables pour le mortel de base, en a certes reversé à l’État une partie, cela tout le monde le sait. Qu’on veuille bien croire que je ne tiens pas à ce que M. Cahuzac soit incarcéré, ce n’est pas mon genre. Ce qui me scandalise c’est que, dans ce pays où l’Égalité serait appréciée plus qu’ailleurs, j’ai connu, c’était il y a près de vingt ans, un petit voleur de matériel d’enregistrement musical, il avait vingt-deux ans et venait du Maghreb : on le prit, on le garda deux années sous les verrous. C’est aussi que chaque jour m’apporte de ces nouvelles de l’égalité à la française. Des violeurs multirécidivistes courent les rues. Un Mohammed Merah repéré de longtemps par les services de police, délinquant récidiviste puni une seule fois lorsqu’il devint majeur, touriste en Afghanistan, djihadiste presque patenté, finit en assassin de quatre adultes et de trois enfants avant qu’il devienne nécessaire de l’abattre, selon le terme en usage ! N’étant pas un naïf irrémédiable, je sais que tous les tribunaux de tous les temps voient leur histoire émaillée de ces incohérences abjectes. Les législateurs, les juges, les constructeurs de lieux de détention devraient faire un effort, il me semble.

Le 4/X

 

#. L’art instruit. Mme Florence Evin, visionneuse d’art au Monde (ce 4 octobre) titre ainsi son article : « Au Louvre, Bouchardon fait frissonner le marbre ». Je dirai volontiers qu’il a fait et fera aussi frissonner jeunes filles et jeunes gens peu intéressés ou peu avertis. C’est le Faune endormi inspiré à l’évidence du Satyre Barberini romain saisi dans le sommeil de l’ivresse. Ici, superbe jeune homme, admirable sculpture. Poitrine, ventre, membres, musculature sont naturels et comme façonnés par un Créateur qui aurait su ce qu’il avait à faire. Le visage est celui d’un demi-dieu. Peut-être n’a-t-on jamais fait mieux, même chez les Grecs et les Italiens. La pose est alanguie, mais sans trop ; le réveil – Mme Evin le souligne à raison – peut survenir à tout instant. Les cuisses sont ouvertes, le sexe en repos a des dimensions et une forme qui conviennent au jeune homme doué de toutes ses énergies. Il n’a pas l’allure du ridicule sifflet qu’on voit à la plupart des statues masculines et repose sur des bourses parfaites et parfaitement visibles, la toison pubienne est nettement marquée. La sculpture fut dédiée à Louis XV, on le comprend et on comprend ce roi. Beauté, nature, vérité. Oui, une très belle image éducative qui pourrait figurer elle aussi dans tous les manuels scolaires, et sur les écrans remplacer les images pornographiques qu’on y distribue à loisir. Pour que les enfants de la république puissent distinguer sans erreur l’homme de la femme, d’un côté on leur ferait voir ce faune magnifique (en dépit de son appendice caudal discret) et L’Origine du monde de Courbet. Non pour titiller en eux la tentation de l’obscène, mais parce que « c’est ainsi et pas autrement ! »

Le 5/X

 

#. Le seul et vrai problème de nos sociétés contemporaines est de savoir si les forces du capitalisme actuel, exacerbé, brutal et sans souci de l’humain, celles de l’argent en somme, cause de la ruine physique et morale des populations, seront ou non dominées et conduites par les forces politiques représentatives que l’on suppose encore intègres, incorruptibles et animées par quelque morale du bien commun.

Le 6/X

 

#. Sans compter les blessés et les infirmes… 2015-2016 : Charlie Hebdo, 14 ou 15 (je ne sais plus) concitoyens assassinés ; le supermarché cascher, 4 ou 5 assassinés ; le Bataclan parisien, 130 assassinés, novembre 2016 ; à Nice, juillet 2016, 86 victimes écrasées par un fanatique ; et enfin un couple de policiers égorgés dans l’Essonne… À partir de combien d’assassinats de mes concitoyens par les émules de Daesch, eux-mêmes émules d’Allah et du Coran quoi qu’on en pense, les Robots* Islamolâtres bien-pensants qui nous gouvernent exigeront-ils que je devienne un islamophile convaincu, et les gens du CFCM et de l’UOIA que j’aie foi en leurs bonnes paroles ?

Le 7/X

* à propos des Robots, voir plus bas.

 

#. Hier soir, vu une émission de télévision consacrée à la période de l’épuration dans la région parisienne. L’époque me hante et me trouble encore. Les femmes tondues, horizontales accusées de « collaboration » pour s’être mises au lit avec des soldats allemands, brutalisées par des résistants de la onzième heure, des lâches qui sourient en cognant et maniant la paire de ciseaux. Scènes déjà vues, bien entendu. Puis, l’épisode tragique de l’Institut dentaire, aujourd’hui George-Eastman, où des résistants haineux s’improvisèrent justiciers, sous la baguette d’un sous-lieutenant communiste, René Sentuc. Pas de procès réels : des dénonciations, des accusations, des condamnations à mort à effet immédiat, véritables assassinats (celui des époux Goa, pris pour qui il n’étaient pas ; celui d’une laveuse de linge dont le métier fit qu’elle ne put échapper à l’obligation de laver le linge des occupants). Exécutions sans appel. Méthode stalinienne. Il y eut une quarantaine de fusillés contre le mur de l’Institut, des corps criblés de balles furent retrouvés dans la rue (Madeleine Goa), d’autres dans la Seine. René Sentuc, né en 1900, vécut 84 ans, conseiller municipal de la ville de Malakoff, estimé non condamnable par la justice française, décoré trois fois : croix de guerre, médaille de la Résistance, chevalier de la Légion d’honneur !

L’Institut George-Eastman est à peu de chose près sous les fenêtres de mon appartement parisien. Dans ledit Parc-Choisy, il a la même figure rose et benoîte qu’il avait lors de sa construction, en 1937. J’en ai des aigreurs dans la gorge et l’estomac. Mais à Paris, certes, ne font pas défaut d’autres lieux de noire mémoire.

Le 9/X

 

#. M. Donald Trump et Mme Hillary Clinton ont eu leur deuxième confrontation publique. Ils se sont envoyé des insanités à la figure. Donald a assuré que, lui régnant, Hillary serait en prison. Il oublie les procédures judiciaires en usage aux USA. Le débat navigue au-dessous du niveau le plus bas. Par contraste, nos politiciens paraissent des gentlemen. Donald perdrait ses soutiens républicains mais conserverait son électorat. Hillary, rose et souriante sous les insultes, paraît une rosière d’autrefois. Elle irait à la victoire. Bien, nous verrons. Nous ne pouvons rien que voir.

Le 11/X

 

#. Le sort des immigrants qui se noient par centaines dans les eaux de la Méditerranée me concerne, bien que j’en parle très peu. C’est qu’elle est loin la Méditerranée, que je n’ai aucun sens de l’orientation et ne puis rien faire pour améliorer leur sort. Nous laissons aux Grecs et aux Italiens le soin de les repêcher : une honte absolue. Je ne peux rien davantage pour ceux qui, à Calais, dans leur « jungle » (!!!!!!!…), vont être essaimés sur tout le territoire français, au grand dam des populations locales. Épictète me conseille de ne pas m’occuper d’eux. Ce sont de jeunes hommes qui ne s’implanteront que difficilement chez nous. Nos traditions divergent des leurs, nos principes de vie politique et sociale aussi, leur religion les jette pour beaucoup dans le mépris et la haine. Cela capotera. Les Anglais, chez qui ils veulent se rendre, les laissent pourrir chez nous. Ils ne veulent même pas accueillir les plus jeunes, ceux qui ont de la famille chez eux. Les Anglais ? Ne disons rien de leur comportement, ce serait de l’anglophobie ! L’islamophobie nous suffit largement ! La faiblesse de nos gouvernants passe les bornes. La solution est claire, mais certes compliquée à mettre en œuvre : nous devons aider ces migrants à vivre chez eux, leur en fournir les moyens financiers et techniques, empêcher que les quinze potentats locaux ne se fourrent dans les poches ces financements, sous le paravent protecteur de la souveraineté nationale… On pourrait aussi fusiller les commanditaires des « passeurs », et sans doute les passeurs eux-mêmes qui bourrent les rafiots et les barques de ces malheureux au point qu’elles chavirent à la moindre vaguelette : M. Badinter, dont je sais qu’il a raison de nous l’interdire au nom de notre propre dignité d’hommes et du principe du toujours possible rachat de leurs fautes chez les criminels les plus endurcis, n’ignore pas que ceux-ci resteront à jamais ce qu’ils sont, des durs, des irréductibles du crime et de la mort d’autrui. Que rien ne peut les arrêter qu’un peloton d’exécution, ou un emprisonnement à perpétuité qui n’est pas admis lui non plus. C’est se battre en ayant les mains liées dans le dos. C’est absurde. Mais c’est.

Le 11/X

 

#. Beaux jours à Viry-Châtillon, charmante cité de l’Essonne. Cette localité possède un immense carrefour en forme rond-point (la Grande Borne) où des voleurs de grands chemins à la mode du jour se font un sport de pratiquer le vol à la portière sur les automobilistes à l’arrêt, dépouillements systématiques, petite industrie locale qui ne va pas sans violences. On installe une caméra de surveillance pour les en dissuader : l’outil est plusieurs fois mis hors service, détruit. On poste donc à proximité deux voitures de policiers municipaux afin qu’ils surveillent le dispositif de surveillance. Ubu est toujours roi. Ils sont attaqués par douze ou quinze « sportifs-artisans » locaux, gênés dans leurs activités. Deux policiers dans chaque voiture. Les vitres des véhicules sont brisées, des cocktails Molotov lancés dans les voitures, les portières de l’une d’elles auraient été bloquées : tout s’enflamme, c’est une scène de guerre, une embuscade, un guet-apens. Qui plus est, une tentative d’assassinat caractérisée. Les flammes montent très haut. En témoignent les films des passants. L’attaque aurait duré moins d’une minute. Tous les criminels, gentils moineaux de la banlieue, s’envolent. Les policiers sont secourus par des passants héroïques : la température du brasier serait de 1000 degrés. Une policière est très gravement brûlée, son collègue a les poumons atteints et 30% de la surface de son corps brûlés : il lutte contre la mort. Un autre collègue, qui leur a porté secours, a les mains et le visage brûlés.

Toutes les polices de France sont dans un état de fureur totale. On leur lie les mains à elles aussi. Comme nous ne sommes pas aux États-Unis, l’utilisation des armes réglementaires est interdite à la police, même semble-t-il en cas de légitime défense. Chaque policier est donc une cible potentielle. S’il a le malheur d’user d’une matraque, il est aussitôt condamné pour réponse inappropriée à la violence, traité de suppôt du fascisme. Son métier, maintenir l’ordre, assurer la sécurité de ses citoyens sans moyens pour assurer la sienne propre, n’a plus aucun sens. Le laxisme judiciaire et l’idéologie socialisante, qui posent le principe que le criminel ne l’est devenu que parce qu’il est une victime de la société, nous font régresser chaque jour un peu plus vers les ignominies des coupe-gorges des siècles précédents. À quand les attaques de bandes d’Écorcheurs et de coupe-jarrets qui sillonnèrent le pays aux XIIIe et XIVe siècles ? Sommes-nous dans un état de pré-guerre civile ?

Nos gouvernants ont élevé la voix. M. Hollande a condamné en termes tranchants et promis des peines exemplaires. M. Valls, menton levé, assuré qu’on rhabillerait la police de vêtements ignifugés, que les voitures seraient mieux protégées des caillassages préludant à leur incendie. M. Cazeneuve, sublime, usant d’un mot que M. Chevènement utilisa il y a trente ans (sous une rafale de critiques d’ailleurs), condamna lui aussi les « sauvageons » coupables de l’empêcher, lui et Son Incompétence*, d’achever sans heurts leur désastreux quinquennat. « Vilains garçons ! Petites canailles ! Méfiez-vous, nous pourrions être impitoyables, et même sévères avec vous. Nous vous avons à l’œil ». On en rit encore dans les « cités » qui bordent le rond-point de la Grande Borne.

Le 12/X

* J’avais surnommé Son Incompétence, il y a plusieurs mois de cela, notre président de la république. Aujourd’hui, le trait étant presque tiré, je dois constater que je ne branche pas une seule radio, un écran de télévision sans que des journalistes et commentateurs autrefois tout acquis aux valeurs évangélico-laïques du socialisme à la française, ne rivalisent d’arguments propres à mettre plus bas que terre celui qu’ils adoraient autrefois. C’est sur eux-mêmes qu’ils s’acharnent, sur leur aveuglement, leur stupidité… Rien de plus cruel que le croyant déçu, trahi… que l’aveugle qui recouvre la vue. Dois-je me sentir satisfait pour autant ? Non, pas du tout, mais attristé ! Désolé que l’on en soit arrivé là.

 

#. Fragments d’un « journal » inexistant. J’ai refusé le genre journal, d’abord par paresse, ensuite parce que de m’y tenir chaque jour est au-dessus de mes forces, et plus encore de m’y contraindre d’y écrire quelque chose sans que le désir en soit urgent. Cependant, par exception, j’en produis ici un fragment perdu au milieu de ce mois d’octobre. Trop d’événements nous y retiennent, y compris nos pensées en perpétuelle bousculade :

J’ai supprimé de deux de mes écrits récents (autrement dit, me suis autocensuré) quelques réflexions concernant l’avortement. Moins parce que me faire entendre est impossible aujourd’hui, je suis capable de crier haut, mais parce que je n’avais pas pris claire conscience du fait que, m’exprimant sur cette question douloureuse, quoique de façon générale et en tant que fait de société, je blessais immanquablement des femmes, des personnes singulières, pour mille raisons. Je ravivais ou accroissais leur douleurs éventuelles, leurs chagrins, peut-être leurs remords… J’en éprouve une peine amère. Je n’ai ni l’âme, ni le cœur, ni le tempérament d’un accusateur, moins encore d’un inquisiteur. Je ne puis donc me résoudre à l’inévitable quiproquo sans ignorer que c’est dans l’indiscutable et le non-dit que se cristallisent les plus grands tabous. Je gomme donc !… et demande leur pardon à celles que j’ai pu blesser, tout en rappelant que je ne lutte, très occasionnellement, que sur le front des principes.

 

§. J’ai usé plusieurs fois du terme « Robot » (majuscule inévitable, car c’est une figure démesurée de notre Grand Guignol contemporain, figure géante en raison de la profusion-confusion des actuelles coproductions médiatiques). Qu’est-ce donc que ce Robot ? J’ai quelque mal à dire « Qui est-il ? », car il n’est pas.

« Robot pensif », ainsi nommé parce que précisément il ne pense pas, surtout lorsqu’il croit penser. Il est essentiellement psittaciste, répétant formules et slogans appris, qu’il n’hésite pas à dire être sa foi ou ses convictions, c’est selon. Ce que Cincinnatus appelle « la controverse » lui est étranger. Ce qu’il veut c’est détruire, abattre, non pas discuter. Au mieux il tente de me convertir à son idée, tel un vieux missionnaire en Afrique, car il ne peut qu’avoir raison. De sa propre intolérance il n’a jamais eu conscience.

J’appelle Robot celui ou celle qui, n’ayant pas ouvert le Coran, se permet de parler de l’islam sur le ton de l’expertise. Celui ou celle qui, plongé dans le seul Coran, est incapable de s’en extraire et d’accepter le monde qui l’entoure.

J’appelle Robot (usant de l’anaphore tant appréciée de nos jours) celui ou celle qui déclare que la critique des religions (à l’exception de la catholique, à laquelle je ne suis nullement affilié) n’est jamais que stigmatisation.

J’appelle Robot celui ou celle qui dénonçant sans cesse les symptômes, refuse d’en examiner les causes. Sur ce point, ni « gauche » supposée, ni « droite » supposée ne sont à l’abri de la critique.

J’appelle Robot celui ou celle qui, sans même en avoir conscience, ne cesse de stigmatiser, la qualifiant de « fasciste », toute personne qui énonce une seule idée contredisant sa propre programmation intellectuelle.

J’appelle Robot celui ou celle qui pour condamner un avis, une phrase, un article… de qui que ce soit, ne dispose que d’un seul qualificatif dicté par la pauvreté et l’automatisme de son langage, « nauséabond ».

J’appelle Robot celui ou celle qui, pétitionnant à tout-va en faveur de ses idées, ne souhaite pas une seconde discuter celles des autres. Pour eux, l’Autre est d’abord l’opposant, l’ennemi qui ne peut donc qu’avoir tort.

J’appelle Robot celui ou celle qui, au nom de sa peur ou de sa haine, ou à l’inverse au nom de sa crainte de ne pas répondre à l’image humaniste universaliste qu’il se fait de lui-même, rejette l’Étranger sans examiner qui il est, ce qu’il veut ou lui veut, dans les deux cas agissant en aveugle perdu dans sa nuit.

J’appelle Robots ceux qui fréquentent l’Église et écoutent ses cantiques lénitifs, ses plaintives auto-culpabilisations ; le Temple et ses discours propres à noyer tous les poissons de l’océan, à répandre les brouillards et la fumée sur les faits réels ; la Synagogue où l’on ne parle que de soi et de la communauté*, où l’on fait bande-à-part en toute tranquillité d’esprit, la Mosquée où se diffuse la pensée que l’Autre est un kouffar (mécréant) mangeur de porc méprisable et dégoûtant, dont il faut le moins possible écouter les leçons à l’école afin de rester ignorant de tout ce qui n’est pas soi-même. J’appelle Robots ceux et celles qui, infiniment nombreux, ne veulent entendre parler de rien de tout cela, tentent de vivre leur hédonisme bovin en se réunissant dans des salles de concert, où l’on se dandine en masse, bras levés, mains tourniqueuses dans le vacarme de musiques hallucinantes.

Très, très souvent j’écoute Radio J et Judaïque FM, où l’on s’exprime sans sourciller et quoique en république française, au nom de « la communauté ». Cela me stupéfie toujours. Cela se produit aussi, mais moins systématiquement sur les stations telles que Radio Orient, etc.

J’appelle Robot, celui que je suis lorsque, dans une sorte de délire obsessionnel occasionné par les sinistres nouvelles du monde, je ne parviens plus à penser de manière sereine, raisonnable, à quoi que ce soit, me sentant affligé d’une intense fatigue, de violents dégoûts, trottant dans l’ornière boueuse du désir de disparaître bientôt.

 

§. En ce milieu de mois, l’archevêque de Marseille, Mgr Pontier, réprimande les élites gouvernantes (ce n’est plus qu’un mot !) de notre pays, qui naviguent à vue, sans projet ni vision d’avenir. Lorsqu’il invite le peuple à « ne pas décrire chaque réfugié comme un terroriste potentiel… » et à voir « aussi » dans cette foule « des talents qui nous arrivent », je le trouve à deux doigts de se contredire. Son « aussi » m’interroge. Il s’adresse aux chrétiens, bien entendu, qu’il rappelle à leur « devoir d’humanité », sans se soucier de ce que dans cet inénarrable « vivre-ensemble » qu’il préconise, la moitié de l’humanité n’a pas voix au chapitre : ce sont en majorité de jeunes hommes qui nous arrivent, pas de filles ni de fillettes, peu de femmes… L’archevêque n’y pense pas. De la part d’une Église dont la misogynie remonte aux temps de sa fondation, pourquoi s’en étonner ? Mais alors, comment vivrions-nous ensemble parmi ces quelques femmes infériorisées, vêtues de voiles noirs, dont le sort de la plupart n’est que le choix entre les métiers de femme d’intérieur exclusivement ou de prostituée montrée du doigt ?

 

§. Le conseil permanent de la Conférence des évêques de France se met de la partie. Relevons ce courage d’hommes de la religion la plus maudite et décriée, ils osent parler. Bien d’autres ne le font pas. Ils dénoncent l’injuste déséquilibre de notre contrat social, le règne du « marché » engendrant le chômage, le sentiment de la perte d’identité, « terreau de postures racistes réciproques ». Une dame courageuse, Malika Sorel, en a bien parlé. Un moment m’a frappé, celui où les évêques soulignent que « le creuset » de l’intégration des étrangers a plutôt longtemps et bien fonctionné, mais ils ne répondent qu’à grande distance des causes de sa mise en échec aujourd’hui. Il y a un refus : il y a quinze ans, dans les collèges de la république, le bon élève, y compris musulman, était stigmatisé du nom de bouffon, aujourd’hui on le frappe et le traite de pédé ! Un pas est franchi. Rappelons que l’homosexualité est punie de mort en certains pays d’islam. L’islam gagne du terrain en France. On ne veut plus s’intégrer, moins encore s’assimiler. Nous marchons à pas lents vers l’intolérable.

 

§. M. Hollande ne cesse de surprendre. Ses « formules-choc » (appréciées au M) lui permettent de creuser sa tombe et celle de son parti avec un entrain qui fait plaisir. Oui, vraiment !

Il vient de traiter les magistrats de traîtres et de lâches, semblant oublier qu’ils ne font qu’appliquer les lois pénales que son quinquennat inspire (Mme Taubira) et protège. Les magistrats n’ont guère apprécié.

Il déclare que « la femme voilée d’aujourd’hui sera la Marianne de demain ». Reste à savoir si elle sera toujours voilée dans ce rôle de composition. Le M s’offusque de ce que droite et extrême droite (la confusion n’est pas invraisemblable) s’en soient offusquées. Les mots ne disent-ils plus ce qu’ils disent ? On s’interroge. Quelle est la langue qu’il faut traduire ? Celle de Molière ? Celle de Mahomet ? M. Hollande pose des barrières, des conditions : que l’islam s’accommode de la laïcité. Or il ne s’en accommode pas, le Coran et la tradition musulmane le lui interdisent. M. Hollande déclare que les musulmans doivent dénoncer les actes de radicalisation, que les imans doivent ne pas se comporter de manière antirépublicaine. Sauf discrètes exceptions, ils ne font que lui désobéir ! M. Hollande, dont l’inculture est reconnue jusque dans son camp, n’a rien lu et ignore ce qu’est la taqîya, le mensonge diplomatique au nom d’Allah. Il assure encore que « le voile peut être pour la femme musulmane une protection, mais que demain elle n’en aura plus besoin pour être rassurée sur sa présence dans la société ». Rien n’est moins sûr. La femme musulmane, dans la sphère musulmane, a une place, la seconde. Si elle s’extrait du carcan, comme le lui permet parfois la république, elle passe pour une traîtresse ou une « pute ». Certains penseront alors à la mettre à mort. La millénaire tradition bédouine l’exige, que l’on attribue à tort à Allah, qui protégea la femme comme il le put en son temps. Mais les rappels de mémoire, les intentions réformatrices… sont aussi des traîtrises en zones d’islam. Nous sommes loin du compte et pas sortis de l’auberge où manger du rôti de porc est un crime.

 

§. Faut-il rire ou s’étonner de voir tout un peuple pleurer et prier dans les rues, les parcs de Bangkok, la disparition du roi Bhumibol qui régna durant 70 ans. C’était pourtant un potentat aussi cupide que ses confrères. On imagine mal de telles scènes d’affliction publique dans nos villes. Une autre civilisation… après tout il en existe. Une autre sensibilité !

 

§. Le prix Nobel de Littérature vient d’être attribué à Bob Dylan, musicien, chanteur et baladin que sa voix et ses couplets entre charme et critique (j’avoue que je connais bien mal une œuvre que je suppose immense) ont rendu célèbre sur toute la planète. Pierre Michon approuve. Il est presque le seul. Philippe Sollers, peu soucieux de déplaire ces temps-ci, fait mine d’approuver. Mme Annie Ernaux verrait dans ce choix la fin de toute littérature. Précisément, Bob Dylan ne fait pas de littérature, il chante des poèmes. Pierre Assouline, avec l’intelligence aiguë qu’on lui connaît, prétend qu’« il n’y a pas d’œuvre » et que le choix est « méprisant pour les écrivains ». En quoi ? Où y a-t-il mépris ? Ne se sachant pas insignifiant, l’esprit sommaire de M. Assouline s’est peut-être imaginé que, lui-même revêtu des oripeaux de l’académicien suédois, on n’y verrait que du feu, qu’il prendrait enfin une stature. L’envie le travaille, c’est sa nature, les prix littéraires attribués aux uns et aux autres, il les pense retirés à sa personne. Qui plus est, il se croit écrivain. De fait, en cette affaire, si certains ont bien vu que Bob Dylan est un barde, ils ont parfois oublié cependant qu’il maintient la tradition du XIIe siècle, quoique en langue anglaise, celles des Marcabru, jongleur, celle des Bernard de Ventadour, Arnaut Daniel, Jaufré Rudel, Peire Vidal, Bertrand de Born, Guy d’Ussel, troubadours ; celle des Gace Brulé, Conon de Béthune, Thibaut de Champagne… trouvères. Celle, plus moderne, de Rabindranath Tagore, dans une certaine mesure ; celle enfin des poètes chanteurs de la beat generation américaine.

 

§. Des esprits nombreux pensent aujourd’hui à l’attribution d’un « revenu universel » sans condition pour chaque citoyen, chaque habitant de la planète peut-être… Les modalités du calcul des sommes attribuées sont bien sûr diverses et multiples. Les aides sociales disparaîtraient… La banque est aux aguets, cela peut coûter bonbon ! L’idée est fort ancienne : sous diverses formes, l’ont méditée les Thomas More (XVIe siècle), Thomas Paine (XVIIIe siècle), puis Charles Fourier, Bertrand Russell, Milton Friedman, et en France les philosophes André Gorz, Michel Foucault, les économistes Yoland Bresson, Henri Guitton…

Mon avis, mais je ne connais rien à la matière économique, est qu’en raison de la surpopulation galopante de la planète, et du rejet dans le chômage de milliers d’hommes chaque jour, la mesure va s’imposer. Mais l’homme, fait comme il est fait, va s’ennuyer et jalouser son voisin, il ne pourra s’en empêcher. Il va donc fabriquer des enfants, futurs adultes, ses loisirs forcés et son irréflexion l’y invitant. Les populations s’accroissant à mesure, le système finira par s’effondrer et tout recommencera comme avant. Il va aussi se livrer aux jeux d’argent, les uns s’y enrichissant, les autres s’y ruinant. Ces derniers, miséreux et sans travail, retourneront aux mœurs des temps anciens, se changeant en bandits, voleurs, escrocs, banquiers, usuriers, assassins et que sais-je encore ! Les déséquilibres grandiront – fatalité –, et les guerres civiles renaîtront. Bref ce sera pire dans tous les sens. Si je devais être de la fête – ce qu’à Yahvé, Dieu le Père, Allah, Bouddha et Vishnou ne plût –, j’aurais encore le plaisir d’affirmer que la Création est à la fois un ratage majestueux et une farce atroce.

 

§. Ce lundi 24 octobre, les autorités françaises se sont décidées à détruire le camp des migrants de Calais, autrement nommé « la jungle ». Ils y étaient 6000, tout au plus. C’était suffisant pour cet entassement inhumain. Les voici répartis à travers toute la France, généralement bien accueillis. Certains reviendront à Calais ou dans les environs, leur objectif restant le même, l’Angleterre. Plusieurs se sont cachés, qu’on ne puisse les embarquer. Les mineurs seront présentés à l’Angleterre, dont la frilosité égoïste n’étonne pas mais déçoit tout de même.

Le 24/X

 

§. Fin de mois difficile. Les sondages nous disent (mais que valent-ils ?) que M. Hollande a ruiné la confiance populaire, celle de presque tous les membres de son parti et qu’il serait tombé à 4% de popularité… Il défend le triste bilan de son quinquennat en nous abreuvant de statistiques tricheuses et tripotées (la fameuse courbe du chômage, entre autres, serait inversée, ce qui ne veut strictement rien dire). Le dernier des fidèles est l’admirable M. Le Foll : il plaide les yeux portés dans les nuages car il ne sait où les poser. Ailleurs, on tire à boulets rouges ou on se tient les côtes. C’est sinistrement amusant. On ne sait si M. Hollande osera se présenter à la primaire de la « gauche », s’il entrera en lice. Les chiens et les hyènes, dans l’interminable attente, piétinent et geignent sur la ligne de départ. Les commissaires politiques du socialisme en restent cois. Le FN se délecte. Une observation au passage : on avait, dans les rangs du parti, la plus brillante intelligence du moment, celle de M. Hubert Védrine, durant quatre ans il n’a pas été appelé semble-t-il ; on lui a préféré le cerveau assoupi et sans autre projet que de construire un aérodrome inutile, de M. Jean-Marc Hérault. Les copineries et les inimitiés devraient s’arrêter aux portes de la compétence et de l’incompétence… non ?

Le 31/X

 

A Rigolade house :

Reprise des festivités et exercices de plein air !

Le Duel. C’est le milieu de l’automne. Il pleut et il fait froid. Le professeur Purgon est arrivé au Lac des Minimes dans sa Renault Dacia bleue. Le comte des Immeubles-d’En-Face dans son Hispano-Suiza de l’entre-deux guerres, remise en état pour l’occasion. On a peut-être oublié pourquoi l’on tient à se battre, mais on se battra pour l’honneur. Les témoins sont, fait rarissime et trait de modernité, des femmes : la baronne de Krick-en-Krock pour le professeur, car elle est amoureuse du savoir ; la comtesse de Gris-Manoir pour le comte. On s’enfonce dans les sous-bois, les fourrés dégouttant d’eau glacée du Bois de Vincennes. Les donjons du château sont à peine visibles. On rejoint les fossés par un sentier caché. Tout Rigolade-House est présent. On a choisi le pistolet, à douze mètres, l’épée ayant été jugée trop sanglante. Le combat ira au premier sang. Le cas échéant, on mourra d’une balle vagabonde, quoique l’idée ait perdu de son attractivité, mais on ne souffrira pas longtemps d’atroces blessures. Un médecin du XIIe arrondissement, le docteur Robert Penicillium-Valium, dans l’espoir de se gagner une clientèle huppée, a accepté de superviser les débats.

Les duellistes prennent place sur le terrain, le professeur au pied d’un chêne sous lequel Diderot expliqua les progrès de la raison à des passants qui jusqu’alors n’y avaient pas pensé, le comte devant un bouquet de noisetiers où Saint-Denis célébra l’abondance des bontés divines quelque temps avant qu’on lui tranchât la tête. Tout Rigolade-House assiste au duel. La tension est palpable. Cali de Montfort-L’Amaury ne peut cacher son émotion : « Ils ne vont pas se tuer, tout de même ! » La comtesse et la baronne mesurent la distance réglementaire entre les deux combattants puis leur présentent les coffrets contenant les pistolets, des armes datant de la bataille de Maastricht.

Le professeur Purgon, d’une voix flageolante quoique empreinte de noblesse, déclare : « Monsieur, vous me rendrez raison de l’accusation de mensonge ! » Les bras se tendent. L’offensé fait feu, un merle qui survolait la clairière tombe en répandant ses plumes. L’offenseur fait feu à son tour, le bonnet de ski qui servait de couvre-chef au professeur (sujet à de fréquentes et douloureuses sinusites) perd son gland de poil de lama des Andes. « Oh, fait le professeur, quel maladroit vous êtes, Monsieur le comte ! » Celui-ci de rétorquer : « C’est ce que nous allons voir dans l’instant, Monsieur le professeur ! » Les pistolets sont rechargés, les bras se tendent derechef, vers l’ancien musée des colonies, lointaines encore, chantent les sirènes des voitures de police. Le comte tire sa seconde balle : « Aïe ! Je suis touché ! » hurle le professeur en s’abattant sur l’herbe où il se tord de douleur. Tous se précipitent, le comte en tête de la troupe : « Monsieur Purgon, vous me voyez désolé… Jamais vous n’auriez dû me provoquer. Voilà… voilà… Je regrette, mais Dieu en a jugé, je crois… Lui seul, car je suis myope et astigmate ! Docteur, examinez la blessure, je vous prie ». On relève la manche du blessé. « Que j’ai mal, murmure-t-il ». « C’est le bras, le triceps n’a pas été touché » déclare le médecin. « Mesdames, messieurs, la balle a effleuré le gras du bras. Monsieur Purgon survivra ! » Un « AAAAhh… » de soulagement retentit dans le bois de Vincennes. Un mince filet de sang s’écoule parmi les feuilles mortes. Cinq voitures de police, gyrophares en fête, cernent la clairière. Cali de Montfort-L’Amaury, ôtant ses mains de ses yeux : « Mon Dieu, merci. Ils sont vivants. Ce n’était donc que du sport ! » Les gendarmes se précipitent. La baronne de Krick-en-Krock, extrêmement mécontente : « Il n’y aura donc jamais de justice en ce bas-monde ! » La comtesse de Gris-Manoir : « Belle matinée n’est-ce pas ? » (suite à venir).

 

Définitions-éclairs

Naissance : Premiers instants d’une catastrophe masquée par des cris de joie.

Naïf : Mauvais élève incapable d’apprendre l’art de gruger autrui.

Nation : Le pire advient lorsqu’elle s’imagine devenue « peuple ». On l’a bien vu lors de la métamorphose des petites nations germaniques en cette tribu emphatique, Das deutsche Volk.

Nature : Plus connue sous le nom d’environnement. Dégradable, exploitable et destructible à volonté. / Animale. Celle sur laquelle s’acharne l’humaine. / Des choses. Celle qu’on ne peut ou ne veut modifier, sauf pour que les choses empirent.

NéantTo be or not to be ? Le doute s’insinue.

Nihilisme : Aberration philosophique qui consiste à croire au néant tout en ne cessant pas d’être.

Noble : Épithète qui n’a plus que des emplois restreints. / Un noble propos. Une phrase ampoulée. / Une noble intention. Celle que l’on n’a pas l’intention de mettre en œuvre. / De nobles pensées. De pures obscénités. / Une noble cause. Celle dont on est heureux que d’autres se chargent de la servir ou de la défendre.

NOIR : Opposé au « BLANC ». Le vrai scandale est dans la négation de toute civilisation dès lors que l’un asservit l’autre.

Nomadisme : Méthode à envisager lorsque les choses se gâtent.

Non : Ne se dit plus à qui ni à quoi que ce soit. Ce serait au plus haut point inapproprié, car selon les acquis de la philosophie, les intentions de l’homme bon ne peuvent être que bonnes.

Notoriété : On apprécie le degré de gravité de la maladie grâce au notoriomètre, qui se porte dans le fondement tel l’ancien thermomètre. Les plus affectés en acquièrent une démarche raide et hautaine. Dans les cas désespérés on ne doit plus quitter l’instrument. S’il explose, le porteur de l’objet connaît qu’il vient d’accéder à la gloire.

Nuance : « Il ignorait, pour son bonheur, le cauchemar de la nuance », E. M. Cioran, L’art de la nuance (dont je reconnais n’être pas le meilleur représentant) se perd en effet, car il exige un temps de réflexion.

Nudisme : Mode vestimentaire la moins onéreuse qui soit. Recommandée par la Mairie de Paris et les Contributions directes.

Nudité : La statuaire, depuis Phidias, fut l’éducatrice des jeunes gens en ces longues périodes où pudeur était rigueur. On observera que le sexe des dames y paraissait une allusion et celui des messieurs un euphémisme.

Fin des Carnets XLV

 

Michel Host

 

(1) Je lui rends justice néanmoins : dans ses classes d’anglais d’un lycée de l’académie de Versailles, où elle avait obtenu un poste, des garçons bien élevés quoique narquois, installés au premier rang, se débraguettaient et se masturbaient ; elle fut écœurée et donna sa démission.

 

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A propos du rédacteur

Michel Host

 

(photo Martine Simon)


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Rédacteur. Président d'honneur du magazine.


Michel Host, agrégé d’espagnol, professeur heureux dans une autre vie, poète, nouvelliste, romancier et traducteur à ses heures.

Enfance difficile, voire complexe, mais n’en a fait ni tout un plat littéraire, ni n’a encore assassiné personne.

Aime les dames, la vitesse, le rugby, les araignées, les chats. A fondé l’Ordre du Mistigri, présidé la revue La Sœur de l’Ange.

Derniers ouvrages parus :

La Ville aux hommes, Poèmes, Éd. Encres vives, 2015

Les Jardins d’Atalante, Poème, Éd. Rhubarbe, 2014

Figuration de l’Amante, Poème, Éd. de l’Atlantique, 2010

L’êtrécrivain (préface, Jean Claude Bologne), Méditations et vagabondages sur la condition de l’écrivain, Éd. Rhubarbe, 2020

L’Arbre et le Béton (avec Margo Ohayon), Dialogue, éd. Rhubarbe, 2016

Une vraie jeune fille (nouvelles), Éd. Weyrich, 2015

Mémoires du Serpent (roman), Éd. Hermann, 2010

Une vraie jeune fille (nouvelles), Éd. Weyrich, 2015

Carnets d’un fou. La Styx Croisières Cie, Chroniques mensuelles (années 2000-2020)

Publication numérique, Les Editions de Londres & La Cause Littéraire

 

Traductions :

Luis de Góngora, La Femme chez Góngora, petite anthologie bilingue, Éd. Alcyone, 2018

Aristophane, Lysistrata ou la grève du sexe (2e éd. 2010),

Aristophane, Ploutos (éd. Les Mille & Une nuits)

Trente poèmes d’amour de la tradition mozarabe andalouse (XIIe & XIIIe siècles), 1ère traduction en français, à L’Escampette (2010)

Jorge Manrique, Stances pour le mort de son père (bilingue) Éd. De l’Atlantique (2011)

Federico García Lorca, Romances gitanes (Romancero gitano), Éd. Alcyone, bilingue, 2e éd. 2016

Luis de Góngora, Les 167 Sonnets authentifiés, bilingue, Éd. B. Dumerchez, 2002

Luis de Góngora, La Fable de Polyphème et Galatée, Éditions de l’Escampette, 2005