Boxing-Club, Daniel Rondeau
Boxing-Club, mars 2016, 141 pages, 14 €
Ecrivain(s): Daniel Rondeau Edition: Grasset
« Je m’entraîne dans une grange où j’ai perdu mon sac […]. La boxe m’aère la tête ; elle libère en moi une force insoupçonnée et me confère un étrange sentiment de légèreté. Elle me donne du punch pour m’installer, affûté, à ma table de travail ».
Daniel Rondeau s’est pris de passion pour la boxe « sur le tard et sans avertissement » ; de fait, il est rare que l’on découvre les heurts et les bonheurs du « noble art » à… 56 ans. En ayant éprouvé dans son corps et son esprit les sensations combien intenses, c’est avec justesse qu’en écrivain reconnu il sait trouver les mots pour décrire en une centaine de pages – assorties de sa jolie préface au catalogue de la vente publique de la collection du peintre Eduardo Arroyo, le 22 octobre 2015 – cet univers, ses rites, et ses protagonistes.
Car il y a donc cette grange de ferme de son village de Champagne où il s’entraîne quasi quotidiennement. Et il y a le « coach », Jérôme Vilmain ; celui-ci qui dans la journée travaille depuis trois décennies chez Moët et Chandon, est l’âme du Boxing-Club d’Epernay, « rue de la liberté ». Il supervise avec la même intelligente rigueur la préparation de Daniel – « Lâche pas mon Titi ! » – et celle de ses poulains, au destin desquels Rondeau s’est profondément attaché, qu’il s’agisse par exemple de Jean-Michel Hamilcaro, de la « championne du monde poids mouche » Amira Hamzaoui, ou de « l’elfe noir », le fantôme du club, Maye Cissé – presque aussi doué que le fut le légendaire Panama Al Brown mais dont un fait divers brisa l’élan.
S’appuyant sur Joyce Carol Oates, Hemingway, Norman Mailer et autres Nick Tosches, Rondeau excelle à dire « le ring, cet espace théâtralisé, six mètres sur six, clos de cordes en chanvre, violemment éclairé » ; et que le soir du combat si « l’on joue au tennis ou au football, l’on ne joue pas à la boxe ».
Un texte sobre, sans pathos, et qui résonne comme l’impact des poings contre le sac ou les « pattes d’ours » cibles proposées dans les gants du patient et infatigable entraîneur.
Jean Durry
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