Boire la lumière à la source, Parme Ceriset (par Charles Duttine)
Boire la lumière à la source, Parme Ceriset, Editions du Cygne, janvier 2023, 54 pages, 10 €
Ecrivain(s): Parme Ceriset Edition: Editions du Cygne
Un intense souffle poétique
Ouvrir un recueil de poésies, c’est découvrir un monde de mots marquants, choisis, riches de significations, c’est également entrer dans un univers de sonorités, d’images et de fantaisies évocatrices. On se souvient de la belle remarque de Paul Valery dans « Tel Quel » : « La poésie, cette hésitation prolongée entre le son et le sens ». Une langue qui se cherche, musicale et qui fait vibrer notre intellect, voilà une première approche de l’essence de la poésie qu’on pourrait retenir. Et, c’est ce que l’on ressent fortement en abordant l’ouvrage de Parme Ceriset, Boire la lumière à la source, publié aux Editions du Cygne. Et, on reste séduit par ce recueil où l’on perçoit un délicieux mais intense souffle poétique.
Il y est question tout d’abord de « lumière ». Les mots les plus fréquents qui reviennent sous sa plume sont « l’aube », « l’aurore ». Des moments si particuliers, ceux du réveil, du renouveau, d’une renaissance et si riches de grâce. Ces instants relèvent du « miracle » ou encore du « merveilleux » écrit-elle. Mais cette lumière, Parme Ceriset la saisit partout. Au cœur de la nuit, dans « des éclats fiévreux ». Ou mieux encore dans le brillant des yeux, « Il y a tant de soleil dans les regards » écrit-elle, ou encore « Tu as absorbé tout le ciel dans ton regard ».
Et d’une manière rimbaldienne, cette « lumière » est faite pour être bue. « Renaître à l’aube éclatante / à l’écume de Voie lactée / retrouver la source du Temps / et s’y abreuver… ». Boire la lumière, mêler les sens gustatif et visuel. Une démarche que n’aurait pas renié également Pierre Boujut, ce poète de Jarnac, trop méconnu, avec son « eau de feu » qu’il invitait ces visiteurs amateurs de poésie, à boire et à goûter.
Le recueil de Parme Ceriset est par ailleurs imprégné d’une profonde sensualité. Au-delà du boire et du voir, d’autres sensations sont présentes, sensations olfactives, « C’est le parfum de la liberté / que l’on hume dans le ciel noir », auditives « la famine crie sur les trottoirs », ou encore tactiles « on marche pieds nus / pour sentir l’ocre brûlant ». Les parfums, les couleurs, les sons s’entremêlent dans le monde intense qui est le sien.
Pourquoi une telle avidité de la vie ? Où s’enracine cette volonté d’embrasser le monde, le réel et chacun de ses instants ? On sait avec René Char que « si nous habitons un éclair, il est le cœur de l’éternel » (A la santé du serpent). Cette collusion de l’un et de l’autre anime la quête de Parme Ceriset. Certainement ce qu’elle a vécu explique cet amour intense de chaque moment. Mais au-delà de cette expérience douloureuse qui l’a faite et qui la constitue, c’est ce désir de vie qui séduit dans sa poésie. Il en résulte un livre qui se met à palpiter, à respirer (surtout), à vivre pleinement.
S’il fallait choisir un poème, on retiendrait ce septain :
« À celui qui revient de l’apocalypse
chaque grain de soleil est émerveillement,
chaque pas est victoire sur l’éphémère,
chaque regard est foyer ardent,
chaque goutte, marée céleste,
chaque joie célèbre
l’éternité de l’instant ».
Charles Duttine
Parme Ceriset vit entre Lyon et le Vercors. Médecin de formation, elle a été sauvée en 2008 par une greffe des poumons après quatre ans sous oxygène. Elle est l’auteure de plusieurs ouvrages, dont : Femme d’eau et d’étoiles (éd. Bleu d’encre, Prix Marceline Desbordes-Valmore 2021), et Le Serment de l’espoir (éd. L’Harmattan). Elle a publié des textes dans de nombreuses revues et anthologies.
- Vu : 1992