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Les Livres

En remontant vers le Nord, Lilyane Beauquel

Ecrit par Theo Ananissoh , le Mardi, 15 Avril 2014. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

En remontant vers le Nord, janvier 2014, 235 pages, 18 € . Ecrivain(s): Lilyane Beauquel Edition: Gallimard

 

 

La trame est claire et épurée, à l’image d’un conte comme le qualifie du reste le bandeau. Mais c’est une histoire dense, avec des personnages intenses, qu’ils soient principaux ou secondaires. Au point que le lecteur, tout le long, suppose sans cesse un sens métaphorique qui ne se laisse pas aisément saisir.

Un pays nordique, à la fin du XIXè siècle. Sven, le narrateur, a fui sa vallée natale à l’âge de dix-sept ans. Pendant dix ans, il erre à travers le monde, étudie, devient ingénieur ; puis le voici de retour, chargé d’une mission : creuser un tunnel qui désenclavera ces vallées recluses.

Les tout premiers chapitres du roman décrivent avec un surprenant mélange de vigueur et de poésie la fuite de Sven puis ses retrouvailles avec le pays.

Tempéraments philosophiques, de Platon à Foucault, Peter Sloterdijk

Ecrit par Arnaud Genon , le Lundi, 14 Avril 2014. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Langue allemande, Fayard

Tempéraments philosophiques, de Platon à Foucault, traduit de l’allemand par Olivier Mannoni, janvier 2014, 160 p. 7,50 € . Ecrivain(s): Peter Sloterdijk Edition: Fayard

 

Dis-moi quelle est ta philosophie, je te dirai qui tu es…

Ce petit livre est un recueil de préfaces que Peter Sloterdijk signa, en tant qu’éditeur, dans le cadre d’une collection dont le but était de présenter les auteurs et leur philosophie en leur donnant la parole, c’est-à-dire en offrant un choix de leurs textes annotés par « un certain nombre d’excellents érudits ». Réunis, alors que là n’était pas leur vocation, ces courtes présentations de sept pages en moyenne, dessinent, selon les propres mots du philosophe allemand, « non pas une histoire de la philosophie, mais tout de même une galerie d’études de caractères ». Son titre, quant à lui, renvoie à l’idée que les philosophies vers lesquelles nous nous portons constituent des indicateurs de qui nous sommes, des miroirs, en quelque sorte : « la philosophie que l’on choisit dépend de l’homme que l’on est ». Dix-neuf philosophes, majoritairement allemands, nous sont présentés, par ordre chronologique. L’occasion de constater « que l’éventail des tempéraments philosophiques […] a la même étendue que celle de l’âme éclairée par le logos » : il est illimité.

Critique de la raison nègre, Achille Mbembe

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Samedi, 12 Avril 2014. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Afrique, La Découverte

. Ecrivain(s): Achille Mbembe Edition: La Découverte

 

L’objectif du livre d’Achille Mbembe, Critique de la raison nègre, est de prouver que la figure du « nègre » est indispensable pour penser le monde contemporain. Aujourd’hui ne serions-nous pas en train de devenir tous des nègres au service du capitalisme financier ?

Cet essai se veut politique et poétique. Achille Mbembe connaît parfaitement la vibration des concepts dans l’inconscient collectif et la puissance des idées sur les mécanismes de la domination sociale.

Le titre de son ouvrage est inspiré du celui d’Emmanuel Kant, paru en 1781, Critique de la Raison Pure. Le philosophe allemand avait pour projet d’examiner les conditions dans lesquelles le sujet humain assume sa vie d’adulte au cœur de l’espace public, devient un sujet capable de se dire en liberté et en dialogue avec les autres, dans un geste dialectique d’affirmation d’une certaine singularité et en même temps de participation à quelque chose qui relève de la similarité, de « l’en-commun ». Pour cela, il s’appuyait sur la raison.

Les noces de Zeyn et autres récits, Tayeb Salih

Ecrit par Victoire NGuyen , le Samedi, 12 Avril 2014. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Afrique, Nouvelles, Babel (Actes Sud)

Les noces de Zeyn et autres récits, traduit de l’Arabe (Soudan) par Anne Wade Minkowski, février 2014, 150 pages, 7 € . Ecrivain(s): Tayeb Salih Edition: Babel (Actes Sud)

 

Tayeb Salih : l’art de conter


Les noces de Zeyn et autres récits est un recueil de trois nouvelles. Il est composé d’un long récit d’environ 110 pages et de deux autres nouvelles, Le doum de Wad Hamid, et Une poignée de dattes d’une longueur extrêmement courte par rapport à la première histoire.

Dans la première nouvelle, Zeyn, un simplet du village, surprend tout le monde car il va se marier avec la plus belle fille de la région. Il s’agit de la fille du maire, sa cousine, Ni’ma. Elle est réputée pour sa beauté mais aussi pour sa moralité et son caractère bien trempé. De ce fait, comment un homme aussi laid, aussi difforme et aussi peu clairvoyant que Zeyn a pu obtenir l’amour de la jeune femme ? La nouvelle suscite jalousie et envie.

Clair de femme, Romain Gary

Ecrit par Sophie Galabru , le Vendredi, 11 Avril 2014. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

Clair de femme, 180 p. 7,90 € . Ecrivain(s): Romain Gary Edition: Folio (Gallimard)

 

Le désespoir c’est n’avoir plus foi en rien, même en ses « incroyances ». C’est ainsi que nous pourrions donner la note de Clair de femme, à partir de laquelle se décline un véritable hymne à la vie envers et contre tout. Le livre porte très haut ce ton si particulier à Gary, du désespoir heureux, loin du cynisme et de l’ironie de ceux encore trop attachés à leurs illusions. Le désespoir sans gravité ni aigreur, celui qui n’est que la vie qu’on porte malgré soi.

Et parce qu’il y a d’innombrables vies, il y a autant de façons de vivre son désespoir. Il y a la possibilité du pathétique, à l’image de Señor Galba que rencontre le narrateur, Michel, dès le début du livre, pauvre clown dresseur, si fier de son caniche teint en rose à qui il apprend à danser un sublime paso-doble avec un chimpanzé « un numéro mondialement connu. Des années d’efforts… L’œuvre d’une vie ». L’humour immanquable de Gary, au creux des délires, des croyances, et des petits combats toujours un peu minables face à l’imperturbabilité de la vie, de ses forces obscures, anonymes, sans égard pour chacun.